
Le Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique a la chance de former de jeunes artistes de toutes provenances sociales et géographiques. Il a la chance d’être profondément bouleversé par les questions de société majeures. La réponse de l’Académie des Césars à l’aspiration d’une génération entière à de multiples révolutions fut « non ». Ce « non » qui sonne comme une claque ne peut déclencher qu’une colère encore plus grande.
Ce « non » qui sonne comme une claque ne peut déclencher qu’une colère encore plus grande, et stigmatiser comme hystériques celles et ceux qui souhaitent tout simplement que l’art cesse de s’asseoir publiquement sur les valeurs qu’il prétend défendre.
Les votantes et les votants de l’Académie ont jugé anecdotique la situation des enfants, des adolescentes et des adolescents violées et violés, en célébrant encore une fois un homme reconnu coupable par la justice et n’ayant quasiment pas purgé de peine.
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La honte, oui, mais une honte qui sera de courte durée, car se construit autre chose, dans le conflit, dans la contradiction, et dans la joie, autre chose que rien ne saura plus arrêter car le talent accompagne le courage des générations qui diront, par exemple dans l’école nouvellement créée à l’initiative de Ladj Ly et JR, et dans tous les lieux de résistance et de refondation : « le cinéma et le théâtre c’est aussi nous, il n’y a pas de hiérarchie entre les combats, vous ne nous diviserez pas, et ce que vous avez pris l’habitude de passer sous silence, sous prétexte de rester une famille soudée et compréhensive pour ses pair.e.s, vous a fait oublier qu’elle est bâtie et vit sur des injustices intolérables ».
Il y a tant d’artistes que l’on admire et que l’on aimerait réveiller de leur profond sommeil. Oui, chère Fanny Ardant, il y a les bons et les méchants dans la vie, lorsque l’on met vingt ou trente ans à se réparer d’un viol. Oui, il y a les bons et les méchants, lorsque des actrices ou des acteurs sont sans cesse relégué.e.s à leur couleur de peau par des médias en place dans l’inconscience générale des autres artistes.
Les déclarations de Lambert Wilson qui ont suivi ne peuvent et ne doivent provoquer que le sourire, car céder à la colère et la haine serait sans doute la défaite des petites et petits, des sans grade, du petit peuple sidéré qu’il désigne d’un « mais qui sont ses gens ? ».
Qui sont ces gens en effet, qui entre dans le salon des grandes et grands de ce monde et les incommodent en les rappelant au réel, au réel des victimes, au réel de l’injustice criante, aveuglante, et que ce monde artistique clos sur lui-même est devenu sincèrement incapable de voir. (...)