
Oublier la police pour la contourner, l’éviter, la dépasser, s’en défaire plus que la défaire. Quelques réflexions pas forcement très originales sur le rapport que nous impose le maintien de l’ordre.
« Pas question de parler dans ce texte de l’utilité ou non de l’affrontement avec les flics. Il nous est imposé comme une nécessité chaque fois que nous voulons attaquer ou même seulement nous défendre. Et, tous les jours la police est menaçante, dans ses moindres gestes, dans ses moindres silences. Détestable police ! (...)
Non pas de problème là dessus, mais on peut parler des moyens et des formes. Ce qui me pose problème c’est l’attraction pour les cordons de police déployés devant nous lors des manifestations. Une espèce de fascination morbide pour cette merde est, à mon avis, une entrave à l’imagination et à l’exercice d’une puissance réelle des manifestant.e.s. Une très bonne contribution sur cette question a déjà été faite dans le texte réflexion sur la "violence en manifestation". Je sais pas si j’apporte ici des éléments nouveaux mais j’ai envie d’insister dans cette voie.
Parfois, et sans rapport avec une menace que nous pourrions constituer, on nous déploie plus d’un flic par personne. Mais parfois nous avons un peu d’ascendant, parfois s’ouvrent des possibles et dans ces possibles celui du face à face se déplaçant au rythme des charges n’est pas forcément le meilleur, et peut être même une solution de facilité. Nous sommes pris.e.s comme des mouches face à une vitre, tapant sans cesse sur le même obstacle. Il me semble que nous gagnerions à chercher à nous évader du rapport que nous impose la police dans la rue quand elle est en mode "maintien de l’ordre" comme ils disent. Quand nous sommes nombreux.ses dans les rues, peut-être que nous aurions intérêt à minimiser les épisodes de violences directes face à ces bêtes surarmées, abrutie comme des manches de pioches. D’autant que le coût judiciaire et physique est à chaque fois très élevé.
Il y a quelque chose de vicieux à ce rapport à la police qui semble comme formaté, compulsif. Et même si on a plein de bonnes raisons de s’en prendre à la police, parfois les rapports expérimentés dans ces affrontements ne sont pas les plus intéressants, la tendance viriliste étant particulièrement détestable. Ces expériences façonnent nos façons d’être, nos militances, elles favorisent des postures et des fonctionnements, la répression fonctionne aussi comme un formatage de nos façons d’être et de ça aussi il faut nous échapper.
En plus, il me semble que nous n’avons rien à gagner à vaincre les hommes en armes, il y en aura d’autres pour venir ensuite en cas de défaite. Armée, milices parfois, peuvent remplacer très vite les policiers débordés, l’histoire est pleine de ce genre de cas. Le parti de l’ordre a de la ressource, la guerre est son terrain, et la mise en scène du désordre sa première justification. Il faut un peu plus qu’une "victoire militaire" pour défaire ce monde. (...)