
À l’occasion de la Journée mondiale du refus de la misère, le 17 octobre, l’autrice de cette tribune, présidente d’ATD Quart Monde, explique que partir des plus pauvres pour repenser les finalités du travail peut donner naissance à une nouvelle politique écosociale. Les Territoires zéro chômeur en sont un bel exemple.
Le constat est criant : nos sociétés traitent la nature de la même façon qu’elles traitent leurs membres les plus pauvres. Les ressources naturelles sont souvent pillées et polluées, en toute indifférence et impunité ; les personnes pauvres sont considérées comme complètement négligeables, leur force de travail mise au rebut dès qu’elle n’est plus nécessaire.
La façon dont on traite les personnes en situation d’extrême pauvreté s’avère encore plus pernicieuse que la manière dont on traite la nature. En effet, nul ne blâme la nature d’être responsable de sa dégradation, alors que, trop souvent, les personnes en situation de pauvreté sont accusées de « ne pas vouloir s’en sortir » et sont désignées comme responsables ou coupables de leur situation.
De fait, une même dynamique d’exploitation est à l’œuvre, et appelle à une remise en question globale de la société actuelle.
Pas de véritable politique écologique sans questionnement du travail
La transformation écologique et solidaire de la société n’est pas une bascule qui s’opérera lorsque toutes les conditions seront réunies pour le faire. Promouvoir cette transformation, c’est commencer dès à présent à expérimenter des modes de vivre ensemble qui concilient justice économique, sociale et environnementale. Cela induit un soutien immédiat, fort et pérenne aux initiatives proposant de faire de l’humain et de la nature, non des variables d’ajustement, mais le cœur et la raison d’être des logiques politiques, sociales et économiques. (...)
Les Territoires zéro chômeur font de l’emploi un « bien commun » (...)
C’est tout à l’opposé de l’économie dite « verte » que prônent certaines multinationales, qui ne remet en cause qu’à la marge les fonctionnements de l’économie traditionnelle et s’apparente à du simple « greenwashing »
Territoires zéro chômeur de longue durée ne va pas résoudre à lui seul tous les problèmes écologiques et sociaux. Mais il montre que l’ensemble des acteurs et actrices d’un territoire peuvent se mobiliser, avec celles et ceux qui sont privés de ressources fondamentales, pour produire et défendre de tels biens communs. (...)
Lançons le défi d’une écologie avec, et à partir des plus pauvres (...)
Le regard posé avec gravité sur la crise actuelle, mais aussi, avec espoir, sur l’expérience et la résistance de celles et ceux pour qui « la survie, c’est tous les jours », nous appelle à aller à grands pas vers une véritable justice sociale, économique et environnementale, pensée et mise en œuvre avec toutes et tous, sans exclusion.