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« On ne mendie pas le droit »
Article mis en ligne le 18 septembre 2014
dernière modification le 9 septembre 2014

Avec ses 150 lieux d’information, le planning familial procède à un maillage du territoire. Sexualité, IVG, homophobie, violences conjugales : la crise économique met à vif les rouages d’une société patriarcale. Aux premières loges, les femmes du Planning racontent.

Badou et Sabine sont deux salariées du planning familial de Perpignan. Pour mener à bien les missions de l’association, elles sont appuyées par une équipe de bénévoles dont Jeanne-Louise fait partie. Badou : « Tout le monde pense que les centres du planning familial seront toujours là, qu’il n’y a plus besoin de lutter, de se battre. » Sabine : « C’est un peu comme le droit à l’avortement, les gens pensent que depuis 1975 il n’y pas plus de problème. » Jeanne-Louise : « Et puis il y a eu l’Espagne et là on a eu très peur parce qu’on s’est dit que ça pouvait nous arriver aussi. » Le 20 décembre 2013, le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy (Parti populaire) adoptait un projet de loi de criminalisation de l’avortement [1]. L’onde de choc atteint l’Hexagone où, après les manifestations anti-mariage pour tous et contre la théorie du genre, on redoute ce retour à l’ordre moral (...)

« La majorité des demandes qu’on reçoit concerne l’accès à l’IVG, explique Sigrid du planning de Toulouse. Ce qui n’est pas anodin quand tu vois la complexité des démarches : par quoi je commence ?, qui je peux aller voir ? – tu peux tomber sur un professionnel de la santé anti-IVG, ce qui arrive assez souvent, qui ne va pas te filer les renseignements demandés. Jusqu’à peu, quand tu faisais une recherche sur Internet, le premier site référencé était ivg.net : un site à l’air tout à fait anodin mais qui ne filait aucune information et était en fait un site anti-IVG. Les anti-IVG sont très actifs sur Internet, on reçoit des femmes qui ont essayé d’avoir des infos sur des forums où les témoignages sont là pour les dissuader, en parlant du risque élevé de l’intervention, le tout nourri de témoignages horribles. »

Entre « l’avortement de confort » éructé par Le Pen et consorts et les psalmodies bêlées par les bigots des « marches pour la vie », les messes « pro-vie » et les kermesses de rue labellisées « manif pour tous », on ne peut qu’acquiescer lorsque Sabine résume : « Dans un contexte de crise générale, les premières personnes à qui on s’en prend, ce sont les femmes. »

Autre constat fait dans les accueils des centres du planning : les dernières saillies des opposants au « mariage pour tous » ont fait sauter les digues d’une homophobie jusque là plus contenue. (...)

Mouvement féministe, le planning a dû faire face à ces deux brûlots, savamment entretenus par la task force politico-médiatique : la prostitution et le voile islamique. On sait à quel point ces deux lames de fond ont fracturé les milieux féministes. De son côté, le planning s’est prononcé, au niveau national, contre le projet de loi de pénalisation des clients, estimant que ce dispositif « pénalise les personnes prostituées en priorité » et a insisté pour que les actions à mener se fassent avec les associations de terrain et en prenant en compte la parole des prostituées. A l’intérieur des plannings, cette position ne fait pas l’unanimité. « Ce qui ne pose pas de problème vu qu’on n’est pas dans un mouvement sectaire », précise Sabine. Quant au voile islamique, Sigrid accueille régulièrement des femmes, « qu’elles gardent ou enlèvent leur foulard. On prend en compte les personnes dans leur globalité. » Sachant que pour arriver jusqu’au planning, ces dernières racontent les brimades ou remarques vexatoires qu’elles auront entendu le long du chemin.

Structures fragiles et éminemment politiques, les centres du planning familial ne doivent leur survie qu’à des subventions qui peuvent fluctuer au gré des différentes mandatures nationales ou locales (...)