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« Notre métier a perdu de son sens » : ces AESH envisagent de rendre leur tablier
#aesh #educationnationale #précarité #handicap
Article mis en ligne le 8 novembre 2022

« Aujourd’hui, on ne peut plus travailler correctement et faire évoluer les enfants. Parfois, je me demande si on sert encore à quelque chose ? » À 49 ans, Stéphanie, estime qu’elle a effectué la rentrée scolaire de trop en septembre dernier. AESH à Rennes depuis près de 10 ans, elle travaille dans une école d’un quartier défavorisé de la ville et dénonce des conditions de travail devenues « insupportables ».

À la rentrée de septembre, son rythme de travail a été complètement chamboulé. « Cette année, j’ai une élève que je suis pendant 18 heures et deux autres élèves en mutualisés sur les 6 heures qu’il me reste. Ça fait 30 minutes par jour pour ces derniers, ce qui est largement insuffisant, ce n’est pas un vrai accompagnement. Ça fait mal au cœur de les quitter si rapidement à chaque fois. Je sens que je ne peux pas faire un travail de qualité, je me sens démuni. Notre métier a perdu de son sens ».
Moins de temps avec les enfants

Dénoncés par de nombreuses AESH depuis leurs créations en 2019, les PIAL ont bouleversé l’organisation du travail de ces professionnels en flexibilisant de plus en plus les accompagnements. Il n’est désormais pas rare qu’une même AESH accompagne plusieurs élèves sur des temps moins importants et parfois même sur plusieurs établissements.

Je me fais régulièrement taper dessus… je reçois des baffes, des coups de pied

Dans l’établissement de Stéphanie, plusieurs élèves sont également en attente d’une notification de suivi AESH alors que la Maison départementale des personnes handicapées est confrontée à des délais de traitement des dossiers qui explosent. « Si on les laisse sans accompagnement, ces élèves vont forcément poser des problèmes et on doit trouver du temps en plus pour les prendre en charge afin de soulager les classes, pour que les enseignants puissent faire correctement leur travail ». (...)

« Quand j’arrive à dégager du temps, je m’occupe d’un élève autiste qui peut faire des crises », relate Stéphanie. « Je me fais régulièrement taper dessus, je reçois des baffes, des coups de pied. On devait se mettre en position de défense pour ne pas subir les coups. Il s’enfuit parfois de la classe. C’est dangereux pour tout le monde, je ne suis pas formé à ça ».

« Être AESH ça ne fait plus envie »

Les élèves aux troubles importants requièrent un accompagnement à temps plein quand ils sont scolarisés. Ce qui épuise mécaniquement un vivier d’AESH déjà fragile. Depuis la rentrée, les alertes des personnels et enseignants se multiplient dans le département.

On a un travail précaire, un salaire ridicule, aucune considération… c’est compliqué de rester dans le métier (...)

« Avec ces contrats bloqués à 24 h, beaucoup sont obligés de bosser sur du temps périscolaire pour compléter un salaire par exemple sur le temps cantine ou encore sur les vacances scolaires. Pendant des années, je n’ai pas eu de pause pendant la journée… Les conditions sont très dures. J’ai beaucoup de collègues AESH depuis plus de 10 ans qui quittent la profession. Je me pose aussi la question, je suis épuisée ».

Un rythme intenable

Ce rythme infernal, Stéphanie avoue le subir elle aussi. « Moi je suis en classe le matin de 8 h 45 à 12 h, ensuite j’enchaîne sur la cantine de 12 h à 13 h 45. J’ai ensuite à peine 20 minutes pour manger avant d’enchaîner à nouveau en classe. Et tout ça pour un salaire d’environ 1 050 € par mois - soit 850 € pour mon activité sur le temps scolaire et 200 € pour le reste. C’est misérable ». (...)