
Emmanuel Macron et Elon Musk se sont félicités, vendredi, d’avoir échangé sur la modération des contenus sur Twitter, alors que l’entrepreneur a jusqu’à présent pris des décisions largement contraires aux exhortations du président français et d’autres leaders européens.
"J’en parle ici, sur Twitter, car c’est de cela qu’il s’agit. Cet après-midi (vendredi 2 décembre), j’ai rencontré Elon Musk et nous avons eu une discussion claire et sincère", a écrit Emmanuel Macron, en visite d’État aux États-Unis. L’entretien a eu lieu à la Nouvelle-Orléans et a duré une heure. Il n’avait pas été précédemment annoncé par l’Élysée et s’est tenu à l’écart des médias.
"Conditions d’utilisation transparentes, renforcement significatif de la modération des contenus et protection de la liberté d’expression : Twitter doit faire l’effort de se conformer à la réglementation européenne", a ajouté le chef d’État dans une série de tweets.
Il a également dit avoir évoqué avec le cofondateur de Tesla de "futurs projets industriels verts, comme la production de véhicules électriques et de batteries".
"C’était un honneur de vous voir à nouveau", a répondu Elon Musk, se disant "impatient" au sujet de "projets enthousiasmants en France".
"Elon Musk a confirmé la participation de Twitter à l’Appel de Christchurch. Les contenus terroristes et violents n’ont leur place nulle part", a détaillé le président français, faisant référence à une initiative lancée par plusieurs Etats et ONG en 2019, après la tuerie de Christchurch en Nouvelle-Zélande, dont les images étaient restées accessibles en ligne pendant plusieurs heures.
"Encore un énorme travail à accomplir"
L’homme d’affaires n’a pas réagi sur ce point. Il avait initialement promis un conseil de modération des contenus responsable de toutes les décisions majeures, mais il a finalement lui-même décidé de rétablir de nombreux comptes, à commencer par celui de l’ex-président américain Donald Trump, banni après l’assaut du Capitole en janvier 2021.
Il a aussi mis fin à la lutte contre les fausses informations liées au Covid-19, ce qui est un "gros problème", selon Emmanuel Macron. (...)
Kanye West, Alex Jones... les limites personnelles d’Elon Musk à la liberté d’expression
Le nouveau propriétaire de Twitter a licencié plus de la moitié des employés du groupe californien, et les équipes de modération des contenus n’ont pas été épargnées.
Selon plusieurs ONG, dont le Center for Countering Digital Hate, les messages à caractère raciste, homophobe, misogyne et antisémite ont augmenté de façon "choquante" sur la plateforme depuis un mois.
"Complètement faux", a tweeté Elon Musk en réponse à un article du New York Times détaillant les conclusions des associations. Il a affirmé que le nombre de fois où des tweets contenant des discours de haine sont vus par des utilisateurs "continue à décliner".
L’entrepreneur libertarien a récemment clarifié ses limites personnelles à la liberté d’expression.
Le compte du rappeur américain Kanye West a ainsi été suspendu pour "incitation à la violence", après notamment la publication de propos admiratifs pour Hitler. Et Elon Musk est opposé au retour d’Alex Jones, le complotiste américain d’extrême droite condamné pour avoir affirmé qu’un massacre dans une école n’était qu’une mise en scène pilotée par des opposants aux armes à feu. (...)
Emmanuel Macron a d’ailleurs conclu sa série de tweets en déclarant : "Nous allons travailler avec Twitter pour améliorer la protection des enfants en ligne. Elon Musk me l’a confirmé aujourd’hui. Protégeons mieux nos enfants en ligne !"
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Si le Vieux Continent a posé des limites aux grandes plateformes sociales américaines, il n’a pas su, pour l’heure, promouvoir et accompagner d’autres modèles plus vertueux.
Il y a de quoi, ces temps-ci, être saisi d’effarement à observer le maelström dans lequel est pris Twitter depuis son rachat par Elon Musk, des coupes claires dans les effectifs à la fuite des salariés restants, des inquiétudes au Capitole au sauve-qui-peut des annonceurs, du retour des comptes suspendus à l’abandon de la lutte contre les fausses informations sur le Covid-19. De quoi, aussi, être saisi de vertige à mesurer le décalage entre la place prise par le réseau de microblogging dans la conversation publique et l’écosystème de l’information (...)