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MSF exhorte à "accélérer de toute urgence l’évacuation" des exilés en Libye
Article mis en ligne le 21 juin 2022

En 2021, sur 40 000 inscrits, seulement 1 662 personnes ont pu quitter la Libye via les mécanismes de réinstallation du Haut-commissariat des Nations unies aux réfugiés. Des chiffres très préoccupants pour Médecins sans frontières, qui déplore des critères d’éligibilité trop restrictifs. Seuls les ressortissants de neuf nationalités sont concernés par les vols retours organisés par le HCR. Ces restrictions poussent les migrants à prendre la Méditerranée sur des canots de fortune pour trouver la sécurité, au péril de leur vie.

"Un gardien nous a tiré dessus. Six personnes sont mortes et par chance j’ai survécu". "Tous les jours, les gardes viennent chercher des femmes dans les cellules, et les emmènent à l’extérieur. Ils nous violent devant les autres hommes". "En prison, les migrants sont frappés tous les jours par les gardiens, pour tout et n’importe quoi. Des gens meurent régulièrement à l’intérieur". Les témoignages d’Amadi*, Aminata* et Mahdi* recueillis par InfoMigrants ces derniers mois rendent compte des épreuves épouvantables qui attendent les migrants en Libye. Dans ce pays, traversé par des milliers d’exilés chaque année, le danger est partout. Et surtout dans les geôles, où ils subissent tortures en tout genre, extorsions et viols.

Pour fuir définitivement la violence - qui s’applique aussi dans les rues du pays - les migrants disposent d’une solution : les vols de rapatriement organisés par les Nations unies.

Le Haut-commissariat aux réfugiés (HCR) propose pour sa part des vols humanitaires et de réinstallation à destination de pays européens ou du Canada. Des évacuations sont également planifiées dans des pays transit comme le Niger et le Rwanda, qui permettent la mise à l’abri "des demandeurs d’asile et des réfugiés les plus vulnérables qui courent un risque imminent en Libye", explique Caroline Gluck, porte-parole du HCR en Libye.

L’Organisation internationale pour les migrations (OIM) organise, elle, des vols dits "de retour volontaire" dans le pays d’origine. Entre deux et trois avions quittent la Libye toutes les semaines pour les pays d’origine des migrants, d’après l’agence. Depuis le début de l’année, 5 100 personnes sont rentrées chez elle de cette manière.
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Des programmes en théorie salutaires pour les migrants en danger en Libye. Mais en réalité, très peu accessibles. C’est ce que déplore dans son dernier rapport Médecins sans frontières (MSF). Intitulé "Out of Libya", le document dénonce la "faiblesse" de ces mécanismes de protection, et en premier lieu le caractère beaucoup trop sélectif de ces programmes.
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Des conditions qui excluent une très grande partie des migrants installés en Libye.
Seules neuf nationalités concernées par les programmes de l’ONU
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seuls les ressortissants palestiniens, yéménites, syriens, somaliens, érythréens ou soudanais ont une chance d’embarquer un jour dans les avions humanitaires ou de réinstallation.

Néanmoins, bien qu’il ne soit autorisé à traiter qu’avec neuf nationalités, "le HCR procède, à titre exceptionnel, à l’enregistrement d’un nombre très limité de réfugiés d’autres nationalités lorsqu’il s’avère que ceux-ci sont extrêmement vulnérables et exposés à des risques de violations accrus, ajoute Caroline Gluck. Le HCR continue de plaider pour que toutes les personnes demandant une protection internationale soient autorisées à s’enregistrer auprès de l’organisation en Libye".
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"Il faut aussi savoir que les vols humanitaires au départ de la Libye - y compris les vols de réinstallation - ont été bloqués pendant une grande partie de 2021 par la Direction libyenne de lutte contre la migration illégale (DCIM) qui relève du ministère de l’Intérieur, tient à souligner la porte-parole. Ils n’ont été autorisés à reprendre qu’en novembre, à la suite de multiples efforts de la part de hauts fonctionnaires de l’ONU et d’ambassadeurs étrangers". Un blocage auquel a également été forcé l’OIM. Jusqu’aux rafles perpétrées dans le quartier de Gargaresh en octobre dernier, les avions de l’organisation ont été cloués au sol plusieurs mois, sous couvert de crise sanitaire.

"Il n’y a pas de places pour tout le monde"

Contraint par les directives libyennes, le HCR l’est aussi par les pays d’accueil, pour la plupart européens. "Nous plaidons auprès de ces États pour qu’ils augmentent leurs quotas, assurent de concert Caroline Gluck et Djamal Zamoum. Car c’est aussi à eux de faire le nécessaire, de donner un signal clair en ce sens. Mais depuis quelques mois, à cause de la guerre en Ukraine, la situation s’est compliquée", regrette le chef de mission adjoint.

D’après lui, les pays européens se disent aujourd’hui "débordés" par l’afflux de déplacés ukrainiens.
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Une attitude dénoncée également par MSF, qui exhorte les pays d’asile tiers à justement "accroître le nombre de places". "Nous pensons que les pays sûrs, notamment au sein de l’Union européenne, qui financent depuis des années les garde-côtes libyens et encouragent le retour forcé des migrants vers la Libye ont, au contraire, le devoir de faciliter la sortie et la protection, sur leur sol, de ces personnes victimes de violences", soutient Claudia Lodesani, responsable des programmes en Libye pour MSF. (...)

"En Italie, un corridor humanitaire a déjà été ouvert et permet la sortie d’un certain nombre de personnes en situation de grande vulnérabilité et ayant besoin de protection, notamment des patients de MSF en Libye. Ce type de mécanisme doit pouvoir être dupliqué dans d’autres pays sûrs", affirme-t-elle.
La Méditerranée comme seule échappatoire

En attendant, pour des dizaines de milliers de migrants présents en Libye, la seule échappatoire qui s’offre à eux reste la mer Méditerranée.
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La Méditerranée centrale reste une des routes migratoires les plus meurtrières au monde
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