
En dépit de la fronde des associations de mal-logés et l’opposition de la gauche, l’Assemblée a adopté la proposition de loi sur la « protection des logements de l’occupation illicite » à l’issue d’un débat où le texte a été durci par une alliance Renaissance-Les Républicains-Rassemblement national.
Après une semaine de débats tendus, l’Assemblée nationale a adopté vendredi 2 décembre, en première lecture, la proposition de loi sur les squats et les impayés de loyer, portée par les groupes parlementaires Renaissance et Horizons. (...)
Malgré la levée de boucliers des associations de défense des mal-logés comme des associations de locataires, le texte, à l’issue de son examen dans l’hémicycle, renforce la pénalisation du squat, désormais passible de trois ans de prison et 45 000 euros d’amende. Il limite aussi le pouvoir d’intervention du juge en cas d’impayés de loyers et accélérera donc les procédures d’expulsion.
En cas d’impayés de loyers, le propriétaire pourra en effet unilatéralement résilier le bail, sans passer devant un juge, sauf si le locataire en fait la demande. (...)
Un locataire qui ne se serait pas auto-expulsé après un commandement définitif de quitter les lieux pour impayé de loyer encourt désormais six mois de prison ferme et 7 500 euros d’amende. Cette proposition avait été retirée en commission par le député Guillaume Kasbarian, auteur de la proposition de loi, et finalement réintroduite par le parti Les Républicains (LR) puis votée par une alliance Renaissance-LR-Rassemblement national.
Devant l’émotion suscitée par le texte, le gouvernement avait promis un « rééquilibrage » en séance. C’est pourtant le contraire qui s’est produit avec un durcissement de la loi sur plusieurs aspects.
Désormais, quiconque aiderait ou faciliterait un squat pourra écoper d’une amende de 3 700 euros, un ajout au texte initial. Le squat d’immeubles commerciaux fera encourir les mêmes peines que l’occupation illicite d’un domicile privé.
Dans un avis rendu le 29 novembre, la Défenseure des droits, Claire Hédon, a estimé que « la réforme proposée ne parvient pas à garantir un équilibre entre les droits fondamentaux des occupants illicites et ceux des propriétaires ».
Dans l’hémicycle, le MoDem a tenté de réintroduire le pouvoir d’appréciation du juge en cas d’impayés de loyers. L’amendement déposé en ce sens par le député du parti centriste Erwan Balanant avait même recueilli l’avis favorable du gouvernement. Il a été retoqué là encore par les députés Renaissance alliés à LR et au RN.
« Vol » d’immeuble
L’examen du texte tout au long de la semaine aura révélé à quel point le gouvernement s’est laissé déborder par l’aile la plus droitière de sa majorité. (...)
« Le squat ce n’est pas un vol […]. Mme Genevard confond le sens commun et le droit », a ainsi plaidé Éric Dupond-Moretti en pointant la députée LR qui a introduit cette notion dans la proposition de loi. Les députés Renaissance ont uni leurs voix à celle de LR et du RN sur ce point, infligeant un étrange camouflet au ministre de la justice.
Grand absent tout au long de ces débats, le ministre du logement Olivier Klein n’aura, lui, pas mis un pied dans l’hémicycle pour défendre un texte dont il ne voulait, à l’évidence, pas. (...)
Au-delà des graves conséquences sociales que pourrait avoir l’adoption définitive de ce texte – le Secours catholique alerte sur un possible doublement des procédures d’expulsion –, celui-ci devra sans doute évoluer tant il est juridiquement mal ficelé. Une victoire à la Pyrrhus, donc, pour le gouvernement.