
La mort de Nahel, tué à bout portant par un policier, a fait l’objet de commentaires ignobles. Relativisme, contre-vérités, justifications... Depuis vingt ans, tout est utilisé par les pouvoirs successifs et une extrême droite galopante pour nier la réalité : celle d’une société qui tombe, en oubliant ses principes fondamentaux et les valeurs qui en découlent.
La même rage et la même indignité. La mort de Nahel, 17 ans, tué à bout portant par un policier, mardi 27 juin, à Nanterre (Hauts-de-Seine), aurait dû mettre tout le monde d’accord. Pas de « oui mais », aucune justification, encore moins de relativisme. Dans un monde politique et médiatique un tant soit peu cortiqué, ce genre d’expressions publiques devraient être considérées pour ce qu’elles sont : des déchets de la pensée humaine. (...)
Pourtant, près de vingt ans après la mort de Zyed Benna et Bouna Traoré, rien n’a changé. La situation a même empiré, sous l’effet d’une extrême droite toujours plus puissante, régurgitant ses idées et ses mensonges sur tous les plateaux de télévision où elle a table ouverte. Dans son sillage apparaissent aujourd’hui les visages impassibles de responsables politiques qui n’en portent que le nom. Des élu·es sans autre boussole que le déni. Et qui ont perdu l’essentiel en chemin. (...)
La police est au service des citoyens et d’eux seuls, de leurs droits et de leurs libertés ; sa mission première est d’être une gardienne de la paix au bénéfice de toute la population. Elle est soumise à la République, à ses lois fondamentales et aux valeurs qu’elles énoncent. Or, depuis quelques années, les pouvoirs successifs ont choisi, par lâcheté et fébrilité, de se placer « derrière » les policiers, plutôt que de se mettre devant eux, pour les conduire et les commander.
Les effets tristement concrets de la dérive sécuritaire (...)
Il faut aussi se rappeler les propos tenus par Emmanuel Macron – « Ne parlez pas de répression ou de violences policières, ces mots sont inacceptables dans un État de droit » – et ceux de Gérald Darmanin – « Quand j’entends le mot violences policières, je m’étouffe ». (...)
Le président de la République et le ministre de l’intérieur ont sensiblement changé de ton depuis vingt-quatre heures. Réaffirmant dans un premier temps le droit à la présomption d’innocence, Gérald Darmanin a été contraint de reconnaître, mercredi, en séance de questions au gouvernement au Sénat, que les actes commis la veille à Nanterre « n’ont pas été conformes à la législation et à la déontologie à la formation de la police nationale ».
La Place Beauvau a aussi annoncé, par communiqué, « étudier les modalités » pour dissoudre le syndicat de police d’extrême droite France Police, qui avait publié un tweet – supprimé depuis – félicitant les policiers impliqués dans la mort de Nahel. (...)
le ministère de l’intérieur a effectué un signalement Pharos et saisi le procureur de la République de Paris.
Depuis Marseille (Bouches-du-Rhône), Emmanuel Macron a quant à lui parlé d’un drame « inexplicable, inexcusable » et demandé du « calme pour que la justice se fasse ». La première ministre Élisabeth Borne a également évoqué une intervention « qui ne semble manifestement pas conforme aux règles d’engagement ». Face aux images de la scène et aux premiers éléments de l’enquête, difficile de tenir un autre discours. Mais les mots ne suffisent plus.
Car depuis des années, rien n’a été fait pour lutter sérieusement contre les dérives des forces de l’ordre. Bien au contraire. (...)
Sous la pression de l’extrême droite politique et médiatique, relayée par les droites, une partie de la gauche dite de gouvernement et la plupart des spécialistes du commentaire, les principes fondamentaux et les principes tout court ont peu à peu disparu de notre quotidien. Ils ont été remplacés par les bouillies indigestes servies par la chroniqueuse de CNews Charlotte d’Ornellas ou l’eurodéputé Les Républicains (LR) Jean-François Bellamy.
Cette situation n’est pas seulement pathétique. Elle est aussi dangereuse. (...)
pour reprendre l’expression de la députée Caroline Abadie, les pouvoirs successifs et leurs relais cathodiques ont installé une société où tout se vaut et où rien n’est grave. Même le pire.