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Les forêts françaises, nouvel eldorado industriel ?
Article mis en ligne le 27 septembre 2012
dernière modification le 24 septembre 2012

Le bois en tant qu’énergie renouvelable suscite les convoitises. Des projets de scieries géantes et d’usines de cogénération sortent des cartons. Et menacent l’équilibre d’une filière déjà fragilisée par les délocalisations et la spéculation. Face à l’exploitation intensive de la forêt qui se dessine, des artisans et des PME prônent la mutualisation et les filières courtes.

(...) L’enjeu : la production massive de bois énergie pour alimenter, entre autres, les chauffages au bois, dont la vente ne cesse de progresser. Car la biomasse est à la mode. C’est l’une des principales énergies renouvelables aux côtés de l’hydraulique, de l’éolien et du solaire. « La France accuse un tel retard dans les secteurs éolien et photovoltaïque que pour honorer ses engagements européens de 20% d’énergies renouvelables d’ici 2020, elle mise quasiment tout sur la biomasse, en particulier le bois », prévient René Montagnon, membre de la commission Forêt d’Europe écologie Les Verts. La ministre de l’Écologie Delphine Batho considère d’ailleurs la biomasse comme « une énergie majeure du mix énergétique français » [2] ! (...)

Vendues comme des projets industriels « verts », ces scieries géantes misent sur le bois énergie, dont la valeur s’envole, menaçant l’équilibre de toute la filière. Le créneau est tellement prometteur que la scierie Moulinvest, cinquième de France, est entrée en bourse en avril dernier. Mais cette mode, si elle n’est pas encadrée, pourrait produire des dégâts irréparables. (...)

La France dispose de la 3ème forêt d’Europe, derrière la Suède et la Finlande : 16 millions d’hectares boisés, soit environ 28% du territoire métropolitain. Les forêts françaises et sa filière bois font vivre 400 000 personnes : de la gestion des forêts à la fabrication de meubles et parquets, en passant par le sciage, la confection de papier, la construction de charpente ou de granulés pour le chauffage, le secteur abrite une grande diversité de métiers. Un chiffre d’affaires de 60 milliards [3], généré par quelques 100 000 entreprises qui maillent étroitement le territoire français, souvent dans un milieu rural frappé de plein fouet par la crise. (...)

Chênes et hêtres s’exportent aussi massivement vers la Chine, très gourmande en bois. Les ventes à destination de Pékin ont doublé en 2011. Problème : la matière première s’en va par conteneurs entiers, et revient sous forme de produits manufacturés, bien plus chers. Là encore, la FNB dénonce l’absence de taxe européenne à l’importation. « Sciages, parquets et meuble nous reviennent d’Asie à des prix défiant toute concurrence ! Alors même que la Chine taxe chez elle les parquets importés à hauteur de 20% et les meubles à hauteur de 100% ! »

Pour les entreprises du secteur, c’est un peu la « double-peine » : à l’augmentation du prix de la matière première due à la forte demande mondiale, s’ajoute la concurrence avec des produits qui reviennent bien moins chers d’Asie. (...)

Pour favoriser les filières courtes, qui assurent une gestion plus raisonnable de la forêt et favorisent la création d’emplois bien rémunérés, certains professionnels s’organisent collectivement. En Chartreuse, dans les Alpes, le premier bois AOC de France devrait bientôt voir le jour. Le principe est le suivant : constituer un stock collectif de bois local pour la construction de charpentes et de maisons à ossatures en bois. (...)

Dans le grand Ouest, Yannick Robert, technicien forestier a mis en place voici 7 ans, une filière bois locale, qui permet de mettre en relation directe des petits propriétaires et des utilisateurs locaux. (...)

Avec le départ de Nicolas Sarkozy, soupçonné de vouloir brader l’ONF au privé, voir de céder une partie de la forêt publique, les acteurs ont l’impression d’avoir échappé au pire. Mais alors que se profilent aussi le grand chantier de la rénovation thermique, et le regain d’intérêt pour le bois comme matériau de construction plus écolo, se pose l’épineuse question du modèle de production. (...)