Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
la Croix
Les enfants
/Véronique Olmi Ecrivain
Article mis en ligne le 29 décembre 2021

Près de deux cents enfants sont enfermés dans le camp syrien de Roj. Ces enfants de djihadistes français sont-ils condamnés à grandir dans ces camps, sans pouvoir envisager un futur dans lequel ils auraient, enfin, une place ?

On sait. Et puis on ne sait plus. On oublie. On veut oublier. C’est loin. Pas trop, mais un peu quand même. On a lu des articles, des tribunes signées par des pédopsychiatres, des personnalités de tous bords, des parlementaires, on a vu des alertes de l’Unicef, de la Croix-Rouge, de l’ONU et de nombreuses ONG, on a vu des images à la télé, qu’on confond parfois avec d’autres, car finalement c’est toujours un peu la même chose : des tentes de fortune plantées dans la boue, un ciel bas, gonflé de pluie, des montagnes perdues dans la brume, bon, ce pourrait être la France, Calais, Sangatte, mais non c’est plus loin, et pourtant. (...)

C’est la France aussi. Même si on le refuse, c’est la France. Dans ces camps de la misère, ces petits mômes sous la pluie, leurs bonnets élimés, leurs bottes en caoutchouc, leurs anoraks ringards, minables, d’un autre temps, le temps éternel de la guerre, le temps entre deux temps, qui ne passe pas, le temps des oubliés, ces mômes sont français. Ils sont deux cents, enfermés depuis trois, quatre ou cinq ans, dans le camp syrien de Roj. Certains y sont nés, la majorité y est entrée à moins de 6 ans, certains ont de vagues souvenirs de leur pays (...)

et des questions : « C’est quand mon tour de rentrer ? », « Pourquoi on a peur de nous ? ». On a peur de vous, parce que vos mères, vos mères françaises djihadistes, on a décidé de les laisser là, sans jugement. Alors, depuis Paris, c’est vous qu’on condamne. On vous enferme là, dans ce camp. Pas de soin, pas d’école, la faim, le froid, les maladies, la violence, l’attente qui ne sert à rien. Motif ? Vous serez djihadistes. On anticipe vos crimes, on connaît votre futur, vous nous ferez du mal, vous nous voulez du mal, c’est comme si c’était fait. On se protège de vous, à l’avance. (...)