
La Défenseure des droits alerte sur les très nombreux enfants toujours privés d’école. Les enjeux sont connus : manque de moyens, précarité, handicap, discrimination vis-à-vis des familles étrangères et des enfants ultramarins. Un sujet qui déchaîne moins de passions que d’autres.
ls n’iront pas à l’école lundi. La Défenseure des droits, Claire Hédon, a rappelé le 31 août les entraves persistantes à la scolarité de nombreux enfants en France, en métropole et dans les territoires ultramarins. « C’est notre rôle d’alerter et de recentrer le débat sur le respect des droits fondamentaux pour les populations les plus vulnérables, les plus invisibles, explique Marguerite Aurenche, cheffe du pôle Défense des droits de l’enfant. C’est essentiel, non pas par rapport au débat médiatique mais parce que cela reflète le cœur et la réalité des nombreuses réclamations que l’on reçoit. »
En juillet, déjà, l’institution s’était auto-saisie, demandant au ministre de l’éducation nationale de lui répondre sur les lycéens et lycéennes sans affectation l’an passé, faute de places dans les établissements.
Près de 18 000 élèves étaient concernés (en grande majorité en lycée professionnel), 33 % de plus qu’en 2021, des élèves parfois tenus, pour poursuivre leur scolarité, de s’éloigner énormément du domicile familial, certains abandonnant en cours de route les études. Cette année, rebelote : l’institution de la Défenseure des droits a « été alertée sur la situation de plusieurs élèves encore en attente d’une affectation dans la semaine précédant la rentrée scolaire 2023 ». (...)
le problème est particulièrement aigu en Île-de-France. (...)
« Les chiffres sont quasiment secret défense du côté de l’académie, constate Yannick Biliec, de la CGT Éducation 91, qui a eu la confirmation, sur seulement quatre collèges de son secteur, d’environ 40 élèves déjà sur le carreau. Il y a un effet volume énorme : il suffit d’un petit bougé sur les résultats du bac, de trop peu d’ouvertures de classes, d’un manque de personnel, pour que tous les facteurs se conjuguent et aboutissent à la même catastrophe que l’an passé. » (...)
« On réduit sur un tableau Excel les formations secrétariat et commerce en pensant que tous les élèves vont suivre et aller dans le bâtiment, mais dans la vraie vie, ça ne marche pas comme ça. »
Les enfants porteurs de handicap seront également nombreux, cette année encore, à rester loin du banc. (...)
Le Comité des droits de l’enfant de l’ONU a par ailleurs demandé « expressément en juin dernier à la France de prendre toutes mesures permettant d’améliorer significativement l’inclusion scolaire des enfants en situation de handicap », rappelle la Défenseure des droits, qui considère que « les établissements scolaires, faisant face à un nombre d’élèves par classe souvent très élevé, et très sollicités pour la mise en œuvre de l’école inclusive, ne se voient pas allouer les moyens nécessaires » à même de permettre une réelle inclusion. (...)
En effet, une bonne part des saisines auprès de la Défenseure concerne des enfants porteurs de handicap en milieu ordinaire, pour lesquels le minimum des « aménagements raisonnables » est « mal ou pas mis en œuvre ». (...)
Citant la Cour des comptes, qui, dans un rapport daté du mois de mars, relevait déjà que « parmi les élèves allophones en attente d’une scolarisation en juin 2021, 50 % avaient attendu plus de six mois pour être scolarisés », l’institution regrette que l’école reste trop longtemps inaccessible aux mineures et mineurs étrangers, en dépit du droit. Le problème se niche dans le trop faible nombre de places dans les unités spécialisées, les UPE2A, pour les élèves allophones, c’est-à-dire ayant une langue maternelle autre que le français, isolés ou venant de familles ayant souvent des parcours complexes de migration.
Enfin, la rentrée sera chaotique dans certains territoires ultramarins comme la Guyane ou les Antilles françaises, « notamment en termes de transports scolaires mais également en raison des nombreuses fermetures de classes », mais encore plus à Mayotte, où la Défenseure des droits estime à 15 000 le nombre de mineur·es non scolarisé·es, une situation de « non-accès à l’éducation » qui perdure depuis « dix ans ». (...)
Le minimum vital n’est pas davantage garanti sur l’île : depuis des mois, l’eau potable coule au compte-gouttes, les habitants·es n’ont accès au robinet qu’un jour sur trois depuis une semaine. Loin des conditions sereines nécessaires à une rentrée sereine, lundi.
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– (FranceTVinfo)
Rentrée : à trois dans une chambre de 9 m², cette lycéenne "rêve d’un logement digne"
(...) Dans cette chambre, Racha dort en haut, sur un lit superposé, sa mère et son petit frère eux, dorment en bas. "C’est une planche de bois le lit", précise Racha. Son frère confirme : "Le matelas est dur. C’est bof, je ne me sens pas bien". Et souvent, quand ils déplacent le lit, ils découvrent des cafards.
Racha est une battante. Malgré ces conditions, elle a terminé le collège, haut la main, en juin dernier. Elle a obtenu son brevet avec mention "Très bien". Lundi 4 septembre, elle entre donc au lycée. "Mon cartable n’est pas là, précise la jeune fille. Il est stocké dans un petit box qu’on loue. Je préfère prendre aucun risque car l’année dernière, je retrouvais des feuilles mangées par les cafards". (...)