
Lors de ses voeux du 1 janvier, Emmanuel Macron a promis de faire en sorte qu’il n’y ait plus de personne vivant dans la rue. Il devrait s’inspirer de ce qui se passe en Finlande ; Depuis plus de trente ans, ce pays met en œuvre une politique volontariste pour résoudre la question des SDF : « un logement d’abord » et la réinsertion suit. Selon ses promoteurs, cette politique « permet d’économiser 15.000 euros par an et par personne ».
Depuis les années 1980, ce pays du nord de l’Europe est passé de près de 20.000 à 6.644 personnes sans domicile fixe (SDF). À titre de comparaison, en France, le nombre de SDF a augmenté de 50 % depuis 2001 pour atteindre les 141.500 début 2012, d’après le rapport sur le mal-logement édité par la Fondation Abbé-Pierre. Certes, la France est douze fois plus peuplée que la Finlande. Mais en proportion, ces chiffres montrent que le pays scandinave compte deux fois moins de SDF que la France.
Le secret de cette réussite ? Une politique menée du local au national, nommée « un logement d’abord », portée par des acteurs engagés issus de trois ministères fondamentaux : l’Environnement, chargé de la construction et de la rénovation des habitations ; les Affaires sociales et la Santé, pour la prise en charge des personnes ; et les Finances, pour dégager le budget nécessaire et soutenir les initiatives. (...)
Les personnes concernées sont celles complètement sans domicile depuis un an ou de façon répétée durant trois ans. Les causes sont variées : environnement difficile ou insalubre, problèmes d’alcool, incapacité à payer son loyer, etc. En Finlande, 80 % des SDF logent chez des amis ou de la famille. Dormir dans la rue est impossible la moitié de l’année, pour cause de grand froid, les températures pouvant baisser jusqu’à - 25 °C l’hiver en ville.
240 millions d’euros ont été dépensés en huit ans, amortis en quelques années
C’est en 2008 qu’est lancé le programme Paavo, qui acte la rénovation des refuges en appartements d’une ou deux pièces à destination des SDF et la construction de milliers de nouveaux logements. L’expérimentation se fait d’abord dans dix villes, avec lesquelles ont été établis des contrats détaillés. « Nous n’avons plus de centres d’accueil de nuit, qui faisaient d’ailleurs partie du problème. Ce ne sont pas des endroits où vivre humainement » (...)
« Nous avons fait une évaluation du coût de l’opération : cela permet d’économiser 15.000 euros par an et par personne. Moins de prison, moins de services d’urgence, moins de visites à l’hôpital… Sans la volonté politique et l’alliance de ces trois ministères, ça n’aurait pas été possible. » Les SDF qui accèdent à un de ces logements payent un loyer, parfois grâce à des aides de l’Etat. (...)
" Les locataires ne seront pas mis à la rue en cas de désaccord, on tentera toujours de trouver des solutions. » Rares sont en effet les personnes qui ne trouvent pas, ici, une stabilité. Dans ce cas, il s’agit de problèmes plus profonds de violence ou de maladie mentale qui doivent être traités dans un autre cadre. (...)
« C’est très important d’avoir un espace individuel où vous avez votre propre indépendance, surtout le droit d’y faire ce que vous voulez. C’est une nouvelle façon de penser. Dans les modèles précédents, c’était d’abord une récompense pour bon comportement. Vous sortiez de votre addiction, et ensuite vous aviez votre appartement. Sauf que dans la plupart des cas, c’est impossible », poursuit Peter Fredriksson. Malgré cette prise de conscience, le processus a mis longtemps à porter ses fruits et est toujours en phase de perfectionnement. Les prochaines étapes ? La prévention et la réhabilitation. La suite sera de se nourrir de la réflexion et de l’expérience d’anciens SDF pour attaquer le mal-logement à sa source. (...)