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Résistance inventerre
« L’organisation Etat islamique est en train de devenir un état mental »
Article mis en ligne le 8 août 2016
dernière modification le 3 août 2016

On note, dans les journaux, une débauche d’analyses sur les attentats terroristes. C’est légitime : chacun veut livrer non pas sa version mais son point de vue sur les causes, les effets, les raisons, les conséquences de ce qui se passe en France.
Personne n’a raison ; personne n’a tort. Il s’agit, avant tout, de donner forme à « quelque chose » qui n’en a pas vraiment. Ce pays de culture, cette nation d’intellectuels (c’est touchant, c’est honorable, c’est ce qui fait la beauté de la France), tente, désespérément, à chaque fois qu’un attentat a lieu sur son territoire, de venir greffer sa part de clairvoyance, de connaissance, d’intelligence sur le chaos.
On ne sait plus qui croire, qui lire, tant l’offre abonde : sociologues, historiens, théologiens, philosophes, écrivains se succèdent, s’empilent parfois, pour tenter de défricher l’indéfrichable.

Ecart vertigineux
Car ce qui frappe, d’abord, quand on lit la presse de ces derniers jours, c’est l’écart vertigineux entre la qualité des auteurs et la médiocrité des acteurs ; entre l’intelligence des articles et la bêtise crasse des actes ; entre la profondeur des éditorialistes et l’indigence des terroristes. Le lecteur a, souvent, le sentiment qu’on ­injecte désespérément, et exagérément, du sens dans ce qui n’en a finalement aucun.

A mesure qu’il perd du territoire, l’EI gagne des cerveaux

(...) Peu importe, en effet, que la part des régions conquises par l’EI se recroqueville comme peau de chagrin. Doucement mais sûrement, elle se déterritorialise ; elle migre désormais vers la géographie des esprits, dans une géographie strictement mentale.

Cette déterritorialisation est une dématérialisation. A mesure qu’il perd du territoire, l’EI gagne des cerveaux. Pays de plus en plus imaginaire dans la réalité, il devient de plus en plus réel dans l’imagination. Chaque parcelle perdue se métamorphose en intention. Les attentats au nom de l’EI ne cesseront pas avec l’EI : le califat perdu, comme le paradis promis, se réalisera dans les têtes.
L’EI sera le pays de tous ceux qui n’ont d’autre état mental que celui de vouloir en faire partie. Ce sera l’Etat de tous ceux qui se trouveront dans un certain état. L’Etat de tous ceux qui seront dans cet état.
A l’heure où le réel et le virtuel se conjuguent et souvent se confondent, comme en atteste notamment le jeu Pokémon Go, ce serait un réflexe appartenant au précédent siècle que d’affirmer qu’un pays qui n’existe pas dans la réalité n’existe pas tout court. (...)