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l’Humanité
L’intégralité de la note officielle sur le « racisme dans la police » que le gouvernement a enterrée
#police #violencespolicieres #racisme
Article mis en ligne le 15 juillet 2023

Le document de douze pages n’a rien d’un brûlot, mais il décrit avec une acuité certaine la prégnance du racisme dans la maison police et les raisons de profondes de ce mal. Mieux, il ne formule pas moins de douze recommandations pour tenter de le faire reculer, qui résonnent douloureusement aujourd’hui, alors que cette question a de nouveau envahi le débat public, après la mort de Nahel, à Nanterre, le 27 juin dernier, victime d’un tir policier.

Document consultable en fin d’article

Cette note que l’Humanité s’est procurée, personne ou presque n’y avait eu accès jusqu’ici, alors qu’elle date de juillet 2021. Seul l’hebdomadaire Charlie Hebdo a évoqué son contenu, dans son édition du mercredi 12 juillet 2023. La raison : un enterrement de première classe orchestré par le gouvernement, qui n’a jamais accepté de la rendre publique. « À l’époque, le ministère de l’Intérieur avait lancé son Beauvau de la sécurité, et il n’a pas dû voir d’un bon œil ce travail », confie aujourd’hui, avec une certaine amertume, son initiateur, le sociologue Smaïn Laacher, alors président du conseil scientifique de la Dilcrah, la Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT.

« Moralement et politiquement, c’est une faute de ne pas avoir publié ce rapport, appuie l’ancien juge assesseur à la Cour nationale du droit d’asile. Nous avons travaillé pendant plusieurs mois ; des policiers, des chercheurs, des responsables associatifs ont accepté de s’exprimer sur ce sujet sensible, qui est au cœur des fondements de notre République… Et on mettrait tout ça à la poubelle ? C’est inadmissible ! » (...)

un constat des plus mesurés : il n’y a pas dans « l’institution policière française » de « racisme systémique », estime la note, mais des problèmes lourds de « formation initiale et continue » et une « régulation » insuffisante de ce phénomène par la hiérarchie policière, comme par l’IGPN (la “police des polices”), jugée trop dépendante de la Direction générale de la police nationale, « ce qui nuit à son efficacité et à sa crédibilité ».

La pédagogie et la médiation, plutôt que les seuls gestes techniques

Constructifs, les chercheurs avancent des pistes d’amélioration, suggérant d’ « augmenter le temps de formation initiale des gardiens de la paix” » et surtout de ne pas limiter celle-ci à l’apprentissage des seuls « gestes techniques », mais au contraire de l’ouvrir à « la lutte contre le racisme », au « fonctionnement de la justice » et aux « sciences humaines et sociales ». Dans le même esprit, ils regrettent que « les évaluations (des agents) ne portent pas sur les manières de faire diminuer la conflictualité », et réclament un enseignement davantage centré sur la « pédagogie » et la « médiation ». La note propose aussi que soit favorisée « une entrée progressive dans le métier » et que « l’avancement de carrière soit “conditionné” au suivi de formations sur la déontologie, l’éthique dans les pratiques policières et la lutte contre le racisme ». Enfin, elle suggère que l’IGPN soit désormais rattachée au ministère de la Justice, et que l’institution soit dirigée par un(e) magistrat(e)… Une dernière mesure qui est bien la seule de ce catalogue à avoir été mise en œuvre par l’exécutif, avec la nomination, en juillet 2022, d’Agnès Thibault-Lecuivre à la tête de la police des polices.

Le conseil scientifique de la Dilcrah a été dissous en janvier dernier

Sur le reste du constat, la fin de non-recevoir est totale. Depuis la place Beauvau, Gérald Darmanin a toujours religieusement nié tout problème de racisme dans la police. Une ligne réaffirmée le 3 juillet dernier par la présidente de l’Assemblée nationale, sur France 2. « Il n’y a pas de problème avec la police en France (…) qui exerce sa mission de façon merveilleuse », a assuré Yaël Braun-Pivet, en réaction à l’alerte lancée par le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’Homme, fustigeant « les profonds problèmes de racisme » dans la police française. Quant au conseil scientifique de la Dilcrah, il a tout bonnement été dissous, en janvier dernier, par Isabelle Rome, ministre chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l’Egalité des chances, sur fond de polémique autour de la question trans. (...)

note police-racisme