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L’hypersexualisation des jeunes, c’est celle de notre culture
Article mis en ligne le 2 février 2012
dernière modification le 30 janvier 2012

Ce n’est pas la jeunesse qui est hypersexualisée. Ce sont les diktats du modèle dominant dont elle est forcément le miroir. Attention aux conséquences, avertit Jocelyne Robert, sexologue et auteure québécoise.

Scènes XXX et sexe-porno se déclinent partout dans l’espace public. Il est de plus en plus rare que l’on parle d’érotisme, de relation, de signification, de désir, de plaisir, d’attente, de consentement, d’éducation à la sexualité… C’est le sexe rigide et focalisé, nombriliste et génitaliste, consumériste, mécanique et pressé d’aboutir, qui règne. ll a tassé sa frangine, la sexualité, qui, dans son coin, continue d’embrasser les panoramas affectif, relationnel, sensuel, émotionnel et identitaire… (...)

Hypocrite, prétendument démocratique et démocratisé, le sexe actuel a tout faux. Il se réserve aux jeunes, riches et bronzés ; aux chairs fraîches, lustrées, épilées, liposuçées. Tantôt machines distributrices de pipes et d’orgasmes clinquants, tantôt instruments au service de la machine, ses acteurs carburent aux dragées bleues alors que la sexualité a faim d’imaginaire, d’étonnement, d’insaisissable et de signification.

Depuis une vingtaine d’années, le sexe en folie est transversal. Il a infiltré toutes les sphères d’activités, a gagné l’espace public, s’est fait star médiatique :
 Des personnalités, de Tiger Woods à DSK, qui ont dû tenter de justifier, sur la place publique, leurs frasques et délires sexuels ;
 Les médias qui font leurs choux, de plus en plus gras, des scandales et faits divers sexuels les plus sensationnalistes ;
 Les magazines pornographiques qui s’annoncent pro-pédophiles ;
 La mode, la musique, les revues, magazines et clips qui s’épivardent (1) à sexualiser le corps des fillettes, à infantiliser celui des femmes et à présenter celui des garçons comme des machines dépourvues d’émotion ;
 Les phénomènes exhibitionnistes via les webcams, sextos-ados, les photos compromettantes envoyées au petit copain qui, désespoir et réveil brutal, se retrouvent sur la Toile…
(...)

Il faut voir les garçons et les filles auprès desquels j’interviens, lorsque je déconstruis avec eux le spectacle porno. Il sont tout yeux, tout oreilles, en redemandent. Un peu plus et ils se laisseraient aller à pousser, en chœur, un grand OUF de soulagement !
(...)

En plus de baigner dans des univers clinquants de sexe, ils complètent, très souvent, leur « formation » sur Internet. Là, ils nourrissent leur imaginaire érotique (si tant est qu’on puisse parler d’érotisme) et se confortent encore un peu plus dans leur perception de ce que sont la masculinité et la féminité. Cela, au carrefour de l’adolescence, alors que le profil érotique et la personnalité psycho-sexuelle sont une cire chaude, docile, prête à se laisser mouler, à prendre forme. (...)

Inutile de transcrire ici le verbatim des contenus explicitement sexuels, violents et misogynes, scandés dans les chansons rap qu’entendent et fredonnent vos enfants dès la petite école.

Je maintiens, malgré ce que je viens d’écrire, que ça n’est pas la jeunesse qui est hypersexuelle. Ces jeunes filles et garçons sont le reflet de nos sociétés, cultures et civilisations qui elles, les hypersexualisent, comme elles sexualisent et hypersexualisent tout. Ils sont notre miroir. (...)

Comment un tel vacarme, un tel tapage porno, pourraient-ils être sans conséquence sur de jeunes êtres humains qui grandissent, malléables, en quête d’identification à des idéaux de genre, qui ont un criant besoin de s’affirmer, de se conformer et de performer pour être reconnus ? Il y a impact. Et il est fulgurant. (...)

Des situations autrefois anecdotiques se font de plus en plus fréquentes. Les spécialistes de la sexualité observent l’arrivée en nombre de personnes jeunes, aux prises, qui avec un érotisme dysfonctionnel, qui avec des incapacités relationnelles ou une dépendance sexuelle ou à la pornographie. Certaines consultent pour se débarrasser de ce qu’elles considèrent comme une aliénation ou une forme de toxicomanie.

L’embonpoint sexuel de nos sociétés démultipliera-t-il les effets pervers et les problèmes sur les adultes de demain ? (...)

Ce monde dans lequel les enfants sont bombardés d’images sexuelles explicites, non conformes à leur âge et à leur stade de développement psycho-sexuel, parfois sans avoir jamais parlé de sexualité avec leurs parents ou reçu d’éducation sexuelle scolaire structurée et limpide, ancrée dans des valeurs humaines, humanistes et humanisantes, me paraît bien biscornu.

Au jour d’aujourd’hui, c’est hélas bien souvent lorsqu’on constate qu’ils ont bien assimilé les diktats du modèle dominant et qu’ils en adoptent les conduites que l’on prend conscience qu’on a failli à notre devoir. (...)

La liberté sexuelle, c’est le contraire de se soumettre. Puissions-nous en témoigner !

Ebuzzing