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le JDD
L’épidémiologiste Dominique Costagliola sur le Covid-19 : "On recule pour sauter encore plus mal"
Article mis en ligne le 25 octobre 2020

Peut-on encore éviter un ­reconfinement total ?

Je n’en suis pas sûre. On ne connaît pas encore l’impact des couvre-feux. L’exemple de la Guyane, où les conditions de vie sont différentes, n’est pas forcément transposable à la métropole. Ces mesures peuvent jouer un rôle dans la réduction du nombre de contacts. La concomitance avec la fermeture des écoles, dont on a négligé le fait qu’elles puissent être une source de contamination, peut aussi se révéler favorable. Mais si au lieu de se voir à 20 heures, on se voit à 18 heures, cela ne servira à rien.

À quoi doit-on s’attendre dans les prochaines semaines ?

Ces mesures n’auront un effet sur les cas diagnostiqués qu’au bout d’une semaine à dix jours après l’infection. Il faut autant de temps pour voir un impact sur les hospitalisations et quelques jours encore pour les admissions en ­réanimation. On peut penser qu’il n’y aura presque aucun changement positif en novembre, au mieux une baisse des nouveaux diagnostics. On va être en tension partout en France. (...)

A-t-on perdu la course contre le virus ?

Les décisions ont été trop ­tardives. La conférence de presse du Premier ministre, le 15 ­septembre, où rien n’a été ­annoncé, a été une occasion ­perdue. On pouvait agir. On n’a pas découvert qu’il ferait froid en ­octobre et que les gens vivraient plus à l’intérieur ! En juillet, le rapport du conseil scientifique annonçait tout ce qui se passe en ce moment. Personne ne l’a pris au sérieux. On a opté pour de petites mesures, en courant après une épidémie prévisible. En septembre, on avait de l’eau aux chevilles. Là, elle nous arrive aux genoux. Et le problème, c’est que le virus est partout.

Quels leviers activer d’urgence ?

Il faut utiliser toutes les armes à notre disposition et je ne comprends pas qu’on ne le fasse pas. Pourquoi le gouvernement ne pousse-t-il pas au télétravail ­partout où c’est possible ? Ce choix politique reste un mystère. Opposer santé et économie n’a aucun sens : les pays qui s’en sortent le mieux sur le plan économique ont bien géré l’épidémie. Par ailleurs, on n’a pas assez expliqué l’utilité des gestes barrière. On a aussi raté la mise en place du triptyque "tester, tracer, isoler". Tester ne suffit pas si on ne dit pas que l’isolement doit débuter dès la ­suspicion d’une infection et si on ne simplifie pas les démarches pour ceux qui doivent s’isoler. Mais je ne suis pas sûre que cette stratégie puisse encore être efficace avec la diffusion actuelle du virus. (...)