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Street Press
L’IGPN a été saisie « J’ai été violé et tabassé par deux policiers dans le commissariat du 19e arrondissement »
Article mis en ligne le 1er mai 2021

Le 5 avril dernier, Tommi est interpellé par des policiers du 19e arrondissement. Au moment de l’arrestation puis pendant sa garde à vue, deux fonctionnaires le frappent et le violent, dit-il. Un certificat médical confirme son récit.

« Ce que ce policier m’a fait, c’est un viol ». Ça n’a pas été facile pour Tommi (1) de témoigner de ce qu’il a vécu. Début avril, il est arrêté à Paris pour un refus d’obtempérer et un recel de vol. Durant son interpellation, il s’est fait, dit-il, étrangler et a subi de nombreux coups par deux policiers du 19ème arrondissement de Paris. Une fois au commissariat, il subit à nouveau des violences et des maltraitances, ainsi qu’un viol. Après la fouille à nu, deux fonctionnaires ont effectué une pénétration anale, commise avec violence et contrainte, indique-t-il les larmes aux yeux. Des faits corroborés par des tests médicaux.

Cet habitant de l’Essonne, âgé de 23 ans qui a souhaité rester anonyme, a confié son histoire à StreetPress et à la web-télévision Le Média. Il a par l’intermédiaire de son avocate Cynthia Vazquez déposé une plainte contre X pour violences volontaires à caractère raciste, viol et atteinte à l’intimité de la vie privée par personnes dépositaires de l’autorité publique. Contactée, la Préfecture de police de Paris précise qu’une « enquête est en cours, l’IGPN (la police des polices) ayant été saisie en judiciaire et en administratif. Par ailleurs, deux fonctionnaires de police ont déposé plainte pour outrage et rébellion à l’encontre du mis en cause ». (...)

« T’es mort, tu vas morfler »

« Des gardes à vue, j’en ai fait et j’ai subi des violences policières. Mais elles étaient “simples”. » Dès son arrivée dans les locaux de StreetPress, le vingtenaire à la veste Kalenji et aux cheveux bruns bien plaqués en arrière raconte sa trajectoire : son parcours en centre de formation d’un club de football professionnel. Il détaille les rêves envolés, les passages en détention, les coups pris dans des interpellations passées. « Mais ça, jamais… » (...)

L’un se place à sa gauche tandis que l’autre monte dans le coffre et se positionne derrière Tommi. « Le premier me dit plusieurs fois : “Je vais te niquer ta mère, sale arabe” », se rappelle-t-il. L’autre l’attrape au cou et aurait ajouté : « Tu vas mourir aujourd’hui ». Pendant dix minutes, le fonctionnaire installé dans le coffre l’étrangle à plusieurs reprises quand l’autre lui donne des coups-de-poing dans l’abdomen. Les deux hommes ne s’arrêtent que pour laisser Tommi reprendre son souffle. Lui suffoque et devient rouge :

« Pour une fois dans ma vie, j’ai vraiment cru que j’allais mourir. »

Entretemps, des agents viennent à la fenêtre de la voiture pour le regarder. « Ils me disaient : “Tu vas bien morfler aujourd’hui”. »
Un viol à la fouille (...)

Outre des ecchymoses sur pratiquement tout le corps et au visage, dues aux coups, la toubib remarque une lésion anale. « Ces constatations sont compatibles avec les déclarations du plaignant », confirme-t-elle sur le certificat médical, appuyant le récit de Tommi. La docteure a effectué des prélèvements ADN qui sont « à la disposition des autorités en charge du dossier », écrit-elle. Elle a également donné trois jours d’ITT à Tommi, « sous réserve de l’absence de complications » et a demandé une évaluation du vingtenaire « afin d’évaluer le retentissement psychologique de ces faits ». (...)

La médecin décide même de garder son patient sur place pour le reste de sa garde à vue, loin du commissariat du 19ème arrondissement. Tommi reste dans une chambre aménagée, sous surveillance, jusqu’à la fin de la journée. Le lendemain, il se rend à l’IGPN et revient sur toute l’histoire pendant plusieurs heures. « J’étais sur une chaise, je n’en pouvais plus, j’avais des douleurs au dos et à l’estomac. C’était un calvaire pour moi mais c’était très important », se souvient-il, « fier d’avoir tout fait dans l’ordre ».

Le mercredi 28 avril, Tommi a déposé une plainte contre X auprès du procureur de la République du tribunal judiciaire de Paris pour « violences volontaires par personnes dépositaires de l’autorité publique », « viol par personnes dépositaires de l’autorité publique » et « atteinte à l’intimité de la vie privée ». Il est accompagné dans ses démarches par le collectif Désarmons-les !. S’il sait que sa dignité « ne sera jamais rendue », Tommi attend une réponse de la justice (...)

« Je sais que ça prend du temps mais au moins que ces deux policiers soient suspendus. »

StreetPress a déjà publié une enquête en novembre sur des violences contre des gardés à vue du commissariat du 19ème arrondissement de Paris. (...)

Insultes à caractère raciste et des menaces de mort. C’est aussi dans ce commissariat que le journaliste Valentin Gendrot s’était infiltré. Dans son livre, Flic, il révélait plusieurs cas de violences policières. Tommi s’ajoute à la liste.

Edit le 29/04 : Le parquet de Paris confirme qu’une enquête a été ouverte et confiée à l’IGPN dès le 8 avril, donc immédiatement à l’issue de la garde à vue de Tommi.