
Le silence et l’opacité qui, en Espagne, enveloppent les scandales de pédophilie dans l’Eglise catholique – et expliquent probablement le nombre limité de cas recensés dans le royaume par rapport à ses voisins –, commencent à s’ébrécher. Alors que la Conférence épiscopale espagnole (CEE) s’oppose fermement à l’idée de créer une commission indépendante comme l’ont fait la France ou l’Allemagne, et que les partis politiques ont montré peu d’intérêt à faire la lumière sur l’ampleur des faits, le quotidien El Pais a décidé de forcer l’Eglise à lever le voile en menant, durant trois ans, une enquête sur les agressions commises par des membres du clergé sur des mineurs. Le résultat est un rapport de 385 pages, mettant en cause 251 religieux, appartenant à 31 diocèses et 31 ordres religieux différents, pour des faits présumés commis entre 1943 et 2018 sur 287 victimes. Si l’on y ajoute les cas déjà connus, le nombre de celles-ci s’élève à 1 237.
Le 2 décembre, à l’occasion du voyage du pape François en Grèce, le dossier a été remis en main propre à un assistant du pontife.
Or, loin de reprendre le flambeau, le 20 décembre, au lendemain de la parution du reportage, la Conférence épiscopale a publié un communiqué critiquant le travail des journalistes, estimant « souhaitable que les accusations que reprend le rapport aient plus de rigueur ».
Révélations en augmentation
Réticente à centraliser l’investigation, la CEE a demandé au quotidien de remettre son rapport aux bureaux de protection des mineurs créés dans chaque diocèse en 2020 – dont l’efficacité est controversée –, ainsi qu’auprès des congrégations religieuses concernées. (...)