
Le 8 mars dernier, les débats sur la loi relative aux Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 ont débuté en commission des lois à l’Assemblée nationale. Ce texte s’apprête, via son article 7, à amorcer la légalisation de la surveillance biométrique, en commençant par la vidéosurveillance algorithmique (VSA).
Cette technologie, basée sur des algorithmes d’intelligence artificielle, est très complexe. Pour nous assurer que les députés soient en mesure de mener ces débats, d’en comprendre les enjeux techniques ainsi que la dangerosité de l’usage de la biométrie, La Quadrature du Net a envoyé à l’ensemble des parlementaires une note fournie et a organisé des sessions d’appel aux députés.
Le résultat a été stupéfiant : à peine une semaine avant le vote en commission, aucun député n’était réellement informé sur le sujet. Ces derniers justifient leur manque d’investissement sur le sujet en pointant du doigt un agenda législatif très chargé. D’autres assument ne pas s’intéresser au sujet et suivre l’avis des responsables du dossier au sein de leur parti. Alors qu’il s’agit de la légalisation d’une des technologies les plus graves de la dernière décennie, de l’acceptation en creux d’une société de surveillance, les députés sont aux abonnés absents.
Sans surprise donc, le jour des débats en commission, très peu de députés ont pris la parole sur le sujet. À coté de celles et ceux de droite ou d’extrême droite ne jurant que par la sécurité et la protection qui seraient inhérentes à la VSA, les élus de la majorité ont été totalement silencieux et n’ont quasiment pas pris la parole (les groupes Horizons et Renaissance n’ont déposé que quelques amendements). Plus effrayant encore, les quelques députés censés être chargés du sujet ont fait étalage de connaissances très approximatives sur les technologies utilisées par la VSA et ont énoncé nombre d’absurdités avec une grande assurance.
Le champion de cette catégorie est sans aucun doute Philippe Latombe, député Modem, fraîchement nommé à la CNIL et autoproclamé spécialiste de la VSA, alors même que ses liens avec l’industrie sont plus que visibles.
(...) La VSA, c’est la surveillance des espaces publics. Dans ces lieux il y a une surreprésentation des personnes précaires et marginalisées par rapport à la population globale, il y a aussi plus d’hommes, moins de personnes très jeunes ou très âgées. Cette surreprésentation se retrouve donc aussi dans les flux vidéo issus de la surveillance de ces espaces. Peut-on pour autant dire que les jeux de données issus de ces captations sont « biaisés » ? Non, cet état de fait n’est pas la conséquence d’une erreur de constitution d’un jeu de données mais bien de la décision politique, ciblée et discriminatoire, de vouloir renforcer la répression précisément dans ces espaces. (...)
Plutôt que de confronter la réalité politique du choix des lieux d’implantation et des populations visées, les défenseurs du texte se cachent derrière des réponses techniques inopérantes relatives à de prétendus « biais » (...)
Lire aussi :
– (France TV info)
Avant Paris 2024, comment la surveillance de masse est devenue une discipline olympique
Alors que les députés français examinent le projet de loi olympique où figure l’autorisation de la surveillance algorithmique, retour sur le contexte sécuritaire des Jeux de l’ère moderne.
"Plus vite, plus haut, plus fort." Aux Jeux, les sportifs ne sont pas les seuls à tenter d’appliquer la devise olympique. En matière sécuritaire, aussi, l’objectif de dépassement se vérifie au fil des olympiades. Depuis cinq décennies, les JO ne se résument plus à un gigantesque barnum, mais aussi à un bunker d’un fort beau gabarit, avec son cortège de gadgets et de lois répressives.
Dernier épisode avec Paris 2024, alors que les députés se penchent sur la loi olympique, depuis le lundi 20 mars, pour autoriser entre autres une technologie inédite en France, la surveillance algorithmique, critiquée par ses opposants tels que la Quadrature du Net. (...)
Une course à l’échalote sécuritaire (...)
– (Cubic)
Vidéosurveillance intelligente pour les Jeux de Paris ? Même les députés européens n’en veulent pas
S’il n’est pas aussi « populaire » que la réforme des retraites, le projet de loi relatif aux Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 est l’objet d’une farouche opposition de la part, notamment, des associations de défense de la vie privée, comme La Quadrature du Net qui a lancé, il y a quelques semaines, une campagne visant à faire tomber l’article 7. Le texte, qui doit être discuté à l’Assemblée nationale le lundi 20 mars, suscite l’inquiétude de députés européens, qui appellent leurs homologues français à s’y opposer.
L’article 7 de la loi, dans le viseur des opposants à la vidéosurveillance intelligente
Ils sont une quarantaine à être préoccupés. Issus des groupes S&D (sociaux-démocrates), Les Verts et la gauche unitaire, les eurodéputés ont pris leur plume pour rédiger une lettre commune adressée aux députés de l’Assemblée nationale dont le sujet n’est autre que le sulfureux article 7 du projet de loi sur les JO 2024.
Rappelons que cet article autorisera, s’il est adopté, le recours à la surveillance et au traitement algorithmiques, en ayant recours au système de vidéosurveillance algorithmique, ou VSA. Certes, l’article n’évoque qu’une expérimentation sur le territoire parisien, mais celle-ci pourrait courir jusqu’au 30 juin 2025, et rien n’indique qu’elle ne pourrait pas être prolongée, voire généralisée par la suite. (...)