Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
huffington post
J’aurais tant voulu vous raconter un accouchement comme les autres plutôt que le cauchemar et le traumatisme que j’ai subis
Article mis en ligne le 14 mars 2018

Il n’est jamais facile d’aborder son accouchement quand ce dernier n’a pas été celui qu’on espérait. Comment une naissance peut devenir traumatisante si l’on n’a pas été accompagnée. A celles à qui c’est arrivé, parlez.

A celles qui ont des doutes, demandez. A celles qui se renseignent, sachez. Aux médecins, écoutez.

Donner la vie est l’une des plus belles choses qui existent, même si certains récits sont parfois difficiles. Voici le mien :

(...) Pas de chance, des urgences + importantes, Guillaume me dira 1 an + tard qu’il y avait une mort. Mes pensées à cette famille malheureuse.

Ces 2 petites heures seront les pires de ma vie. Une éternité. Seuls. Personne. Affolés d’être abandonnés. Pourquoi ils ne viennent pas ? Pourquoi j’ai si mal ? Impossible de faire face à cette douleur et de l’accompagner. Mon cœur éclate, ça sonne de partout, autant dans mes multiples branchements que dans mon corps tout entier. J’explose. J’hurle. Je me sens partir. Guillaume me met des claques pour que je garde les yeux ouverts car je me sens flotter au dessus du lit. Je suis en apnée sans le vouloir. Je ne pense même plus à ta descente à la vie car je vis une descente en enfer. Je suis tellement en colère, en incompréhension. Je ne suis plus moi, je veux juste que mon cœur s’arrête. J’abandonne.

Cette douleur là m’aura changée pour toujours. 2h de calvaire. Pourquoi pourquoi pourquoi ?

Vous arrivez enfin, tous. Vous êtes 3 ? 4 ? 5 ? Je ne sais plus. Un chariot plein d’outils qui brillent. Quelqu’un qui m’injecte un produit magique. Je ne sens plus rien. Ni même mes jambes. Ni même mon ventre. Je ne te sens plus. Je suis un légume incapable de bouger et on me demande de pousser. Mais comment ? Je pousse là ? Non ça ne marche pas. Vous m’avez paralysée.

Alors il me dit un mot qui fait peur. Un mot qu’on ne veut pas entendre. Forceps. Aïe c’est quoi déjà ? Il dit aussi cuillère donc ça ne doit pas être si terrible. Fais ce que tu veux avec ta cuillère mais vite car tout le monde semble affolé sans nous expliquer.

Qu’est ce qu’il se passe ? Une boucherie s’opère entre mes jambes mais je ne le sais pas.
"Tendez les bras, elle est là ! Ne vous inquiétez pas c’est juste votre sang"

Je t’attrape tu es toute chaude et douce. Tu es si petite ! Tu nous regardes avec des grands yeux noirs. Comme tu es belle. Comme je t’aime. Tu as l’air si calme... trop calme.

Vite on t’embarque et tu disparais avec ton papa.

Moi je suis heureuse. Ton placenta sort sans que je ne m’en aperçoive et le médecin est toujours entre mes jambes en train de faire je ne sais quoi. Il y a sûrement des trucs à rafistoler c’est normal. Quelqu’un entre et m’explique que j’ai un périnée complet. Ah super ! Ah non Madame, on dit ça quand vous avez une déchirure complète de tout le périnée. Votre peau s’est déchirée du vagin à l’anus, mais aussi à l’intérieur vous n’avez plus de muscle, alors pour récupérer vos capacités et ne pas que vos organes descendent, Dr X est en train de recoudre minutieusement tous les tissus ça va prendre du temps. Ne vous inquiétez pas. C’est rare mais ça arrive.

Ah ... d’accord ... (...)

Aujourd’hui, 2 ans après, je souffre encore. Physiquement et dans ma tête.
"Cliniquement les coutures sont parfaites Madame Maubert, c’est peut être trop serré, mais il vaut mieux ça que pas assez".

Peut être qu’au lieu de gaspiller des heures, des médicaments, des pratiques violentes, que si ils avaient juste fait une petite échographie et vu que tu étais dans un sacré pétrin avec ce cordon tout emmêlé autour de toi, cela aurait été différent. Ou s’ils avaient laissé la nature faire. Ou s’ils avaient été juste présents. Tout simplement.

Ma vie aurait été différente. Mon corps n’aurait pas été détruit.

Mais on me répond que peut être que tu n’aurais pas été en vie. Alors je me tais. Alors oui j’accepte d’avoir été mutilée pour toi.

Il y a encore tant de choses à raconter. Tant de pratiques traumatisantes dans cette expérience qui aurait pu être si belle ... (...)