
À 28 ans, Arnaud Yao a connu l’esclavage en Libye avant de traverser la Méditerranée pour atteindre l’Italie. Cet Ivoirien met désormais son leadership et son expérience au service d’un refuge pour migrants à la frontière franco-italienne. Portrait.
(...) Fondé par le curé de Bussoleno, Don Luigi Chiampo, en 2017, Fraternita Massi sert de halte aux migrants qui espèrent atteindre l’ouest ou le nord de l’Europe. En 2022, 15 000 migrants y ont transité. Le refuge bénéficie d’ailleurs d’une subvention annuelle du ministère de l’Intérieur italien.
Médiateur et polyglotte
Sur la douzaine de salariés du refuge, on compte deux Albanais et un Malien. Arnaud Yao, lui, a été recruté pour sa maîtrise de l’anglais, de l’italien et du français en plus du baoulé, la langue de son ethnie d’origine. "Quand on m’a parlé du refuge, je me suis dit ’Je parle français, j’ai la peau noire, je peux apporter de la confiance à ces gens-là’", explique le jeune homme.
Mais au-delà des langues, ce sont ses qualités de médiateur qui ont séduit la fondation Talita Kum, qui gère le refuge. Arrivé en Italie en 2016, le jeune Ivoirien a rapidement appris l’italien et s’est engagé comme médiateur dans des maisons communautaires et des centres pour demandeurs d’asile où son expérience de la migration s’avère utile pour l’administration italienne.
"La majorité des Africains noirs pensent qu’ils ne sont pas en Europe tant qu’ils ne sont pas en France, raconte Arnaud Yao. Je leur fais comprendre que l’Europe, c’est une question de patience, qu’il faut des étapes pour devenir citoyen italien, mais qu’ils peuvent avoir un avenir ici. Plusieurs fois, j’ai convaincu des personnes de rester, mais parfois, on ne peut pas les retenir de partir en France." (...)