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FIDH
Harcèlement judiciaire de M. Pierre-Alain Mannoni
Article mis en ligne le 8 septembre 2017

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, partenariat de la FIDH et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), vous prie d’intervenir de toute urgence sur la situation suivante en France.

L’Observatoire a été informé par la Ligue des droits de l’Homme (LDH) du harcèlement judiciaire de M. Pierre-Alain Mannoni, ingénieur à l’Université de Nice Sophia-Antipolis, engagé dans la défense des droits des personnes migrantes et réfugiées notamment dans la vallée de la Roya, région des Alpes Maritimes qui borde la frontière italienne.

Selon les informations reçues, le 11 septembre 2017, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence doit rendre son verdict dans la procédure pénale engagée à l’encontre de M. Pierre-Alain Mannoni, pour « aide à l’entrée, à la circulation et au séjour irréguliers d’un étranger en France » (article L.622-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile - Ceseda), après qu’il ait porté assistance à trois personnes migrantes originaires d’Erythrée dont une mineure en situation de détresse.

Lors de l’audience du 26 juin 2017, l’avocat général de la Cour d’appel a requis une peine de trois mois de prison avec sursis à l’encontre de M. Pierre-Alain Mannoni. Selon lui, M. Pierre-Alain Mannoni « est un citoyen ordinaire qui ne respecte pas le texte de loi en le connaissant très bien du fait de ses activités militantes » et qui fait craindre un « risque de réitération très important ». M. Pierre-Alain Mannoni avait été relaxé en première instance (voir rappel des faits).

A l’issue de la procédure en première instance, M. Christian Estrosi, maire de la ville de Nice, avait dénoncé la relaxe de M. Pierre-Alain Mannoni, l’accusant de mettre « en danger la sécurité des français ». Une plainte en diffamation contre M. Christian Estrosi a été déposée le 3 mars 2017.

La vallée de la Roya dans les Alpes Maritimes, qui compte 5000 habitants, est le théâtre d’une vaste opération policière visant à intimider le passage et la présence de migrants. La vallée est en permanence surveillée par environ quatre-cents policiers et/ou gendarmes, qui opèrent un contrôle strict du déplacement de toute personne « d’apparence étrangère », selon les témoignages des associations. Des dizaines de migrants se cachent et se mettent en danger pour échapper à la police. Ainsi, il y aurait eu officiellement 18 décès de personnes migrantes constatés par les pompiers depuis l’été 2016. En outre, lorsque des personnes sont appréhendées par la police aux frontières françaises, plusieurs témoignages font état de refoulement vers l’Italie, en violation des procédures relatives au droit d’asile. En l’absence de processus d’accueil et d’accompagnement, des habitants se mobilisent pour apporter une aide humanitaire ou un soutien juridique ou social aux personnes migrantes présentes dans la région.

L’Observatoire s’inquiète de la multiplication des cas de personnes harcelées en France pour leur soutien aux personnes migrantes et réfugiées, notamment à Calais, à Paris et dans les Alpes Maritimes.

Plusieurs se sont plaints de la multiplication des cas de convocations au commissariat, de gardes à vue et de poursuites pour aide au séjour irrégulier ou autres délits [1]. L’Observatoire rappelle que le 8 août 2017, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence a condamné M. Cédric Herrou, militant engagé dans des actions d’aide et d’accueil des personnes migrantes et réfugiées, membre du conseil d’administration de l’association « Roya citoyenne » [2].

L’Observatoire dénonce le harcèlement judiciaire dont M. Pierre-Alain Mannoni fait l’objet en ce qu’ils ne visent qu’à le punir pour ses activités légitimes et pacifiques de défense des droits humains, et particulièrement son action en faveur des personnes migrantes et réfugiées dans la vallée de la Roya.

Plus généralement, l’Observatoire appelle les autorités françaises à garantir une protection efficace contre des poursuites visant des actions « humanitaires et désintéressées ». Il appelle les autorités françaises à reformuler l’article L. 622-4 du Ceseda, dont les dispositions sont si imprécises qu’elles peuvent donner lieu à des interprétations jurisprudentielles contradictoires, en fonction de la nature des actes de solidarité incriminés [3]. (...)