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France TV Info
Guerre en Ukraine : comment la Russie traite les "refuzniks", ces appelés qui font tout pour ne pas monter au front
#guerreenukraine #objectiondeconscience
Article mis en ligne le 24 mai 2023

Depuis le début de la guerre, des centaines de Russes ont été poursuivis et emprisonnés pour avoir refusé de faire la guerre. En dépit des risques, certains fuient le pays, se cachent ou même se blessent pour ne pas être envoyés au combat.

"Tu es un homme. Sois-le." En avril, le Kremlin a lancé une grande campagne de recrutement militaire volontaire. Dans la rue ou sur les réseaux sociaux, les publicités incitant les Russes à s’engager s’affichent partout. Moscou entend ainsi reconstituer des rangs éclaircis par quinze mois de guerre. Les autorités n’ont pas annoncé d’objectifs chiffrés, mais l’armée espère enrôler plusieurs centaines de milliers d’hommes. Elles leur promettent "un métier honorable et un salaire décent". (...)

Le sujet est hautement sensible en Russie. Dans les jours qui ont suivi la mobilisation partielle décrétée en septembre, plus de 260 000 hommes ont fui le pays pour ne pas être envoyés au front, selon les services de sécurité. De son côté, le média en ligne russe Mediazona (article en anglais) assure que des centaines d’hommes ont été poursuivis pour avoir refusé de combattre. Déserteurs, objecteurs de conscience, opposants... Certains ne veulent pas rejoindre l’armée, d’autres l’ont quittée une fois enrôlés. Face à ces "refuzniks", l’armée et la justice font preuve de peu d’états d’âme.

Depuis le début de la guerre, les témoignages de militaires russes qui abandonnent leur poste se multiplient. Appelés "AWOL" pour "Absence without official leave" (absence sans congé officiel), ils sont prêts à tout pour ne pas rester au front. Dans un témoignage publié par le média Radio Liberty* en février, un officier originaire de Sibérie envoyé en Ukraine raconte comment il s’est blessé volontairement pour quitter le front : "Un collègue m’a tiré dans la jambe, puis un autre." (...)

Des hommes envoyés de force au front

En plus des abandons de poste, Dmitri traite aussi des affaires de désertion, qui correspondent à un refus de répondre à une convocation militaire. Certains s’opposent à la guerre, quand d’autres ne veulent pas s’enrôler en raison du manque de préparation et de moyens.

"Il y a énormément de témoignages de combattants préparés pour une chose et envoyés faire autre chose. Ils sont entraînés à l’artillerie, et finissent à l’infanterie", illustre Anna Colin Lebedev, politologue spécialiste de la Russie postsoviétique. "Ils disent n’avoir rien à manger, qu’ils doivent acheter eux-mêmes leur équipement, avoir été abandonnés par leurs supérieurs..." (...)

Des centres de "réhabilitation" pour les "refuzniks"

Des "centres de réhabilitation" pour "refuzniks" ont été ouverts par l’armée russe, notamment dans le Donbass, rapportait en novembre sur Telegram* le média russe indépendant Astra. Ce dernier évoquait alors la possible présence de 300 soldats. Ils ont été privés de nourriture, traités de "porcs" ou n’ont pas pu se laver. Se basant sur les témoignages de parents de soldats, Astra a affirmé en avril sur Telegram* que ce centre situé à Zaïtsevo, dans l’oblast de Donetsk, "fonctionnait à nouveau" après une interruption due aux révélations de plusieurs médias. (...)

Par ailleurs, comme le mentionne Courrier international (article réservé aux abonnés), l’Ukraine et la Russie s’accusent respectivement de faire appel à des "zagradotriady", des "unités de barrage" chargées de s’occuper des déserteurs, parfois en leur tirant dessus. (...)

Des condamnations sévères sur le papier

Les militaires qui refusent de participer au combat risquent jusqu’à 10 ans de prison, rappelle l’avocat Dmitri. Selon une enquête de Mediazona (article en anglais) publiée en avril, les tribunaux militaires russes ont traité plus de 700 affaires pénales à ce sujet depuis la dernière mobilisation en septembre 2022. Le motif de poursuite le plus fréquent est l’abandon de poste. Des peines ont été prononcées dans 360 cas, mais environ 40% des condamnations ont abouti à du sursis, donnant ainsi la possibilité aux autorités de renvoyer les soldats au front. (...)

Le processus judiciaire se déroule souvent dans les casernes. "Ce sont des procès spectacles pour renforcer la discipline des troupes. Tous les militaires sont convoqués pour y assister", décrit Dmitri. Les peines sont prononcées et appliquées au sein même de l’armée. "Les prisons internes ont été rétablies dans les casernes. Un commandant peut sans aucun ordre du juge détenir un soldat sans préciser les motifs", ajoute Anna Colin Lebedev. (...)

Ce durcissement des sanctions n’est pas propre à la Russie. En janvier, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a promulgué une loi alourdissant les peines. Elles peuvent atteindre jusqu’à douze ans de prison pour désertion, ainsi que dix ans pour désobéissance ou refus de combattre.
Des associations d’entraide pour éviter l’armée

Pour éviter d’en arriver là, de nombreuses associations viennent en aide aux militaires ou futurs engagés sur les réseaux sociaux. (...)