
Si l’indécence avait un visage, elle aurait celui de Gabriel Matzneff. L’écrivain visé par une enquête pour viols sur mineurs, suite aux révélations de Vanessa Springora dans son livre « Le Consentement » paru en 2020, a trouvé une nouvelle fois moyen de se faire passer pour une victime, un « paria » mis au ban de la société, lui dont les agissements pédocriminels consignés noir sur blanc dans ses livres et son Journal ont pourtant été longtemps tolérés par le milieu médiatico-littéraire.
Après avoir commis un libelle, « Vanessavirus », publié en 2021 grâce à un appel aux dons auprès de ses fidèles soutiens et tiré à 200 exemplaires, l’écrivain de 86 ans récidive avec un livre au titre grandiloquent, et assez célinien : « Derniers écrits avant le massacre ». Le « massacre » en question étant, selon la quatrième de couverture rédigée par Matzneff lui-même, « la féroce chasse à l’homme orchestrée par Vanessa et sa meute ». Venant de quelqu’un qui promouvait « la chasse aux gosses » dans ses écrits, ça ne manque pas d’une poisseuse ironie. (...)
Fait notable, le « paria », dont les livres ne sont en effet plus vendus, a retrouvé un éditeur. Désormais persona non grata dans les maisons où il a longtemps sévi, telle Gallimard, le voilà publié par les éditions de La Nouvelle librairie, affiliées à la librairie parisienne d’extrême droite du même nom. C’est donc tout un beau petit monde qui se tient la main dans cette entreprise. (...)
Ces hypocrites ont envoyé un « message de soutien » aux proches de Lola https://t.co/EH4ZVg1YgV
— Julia (@Julia63184800) October 20, 2022
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Dans l’ombre de Matzneff, l’extrême droite pédophile
L’écrivain Gabriel Matzneff, soupçonné de viol sur mineur, a de nombreux amis et soutiens à l’extrême droite. Certains, comme Alain De Benoist, lui demeurent fidèles. StreetPress s’est aussi plongé dans les revues pédo-nationalistes. Enquête à la BNF.
« La presse d’extrême droite est hystériquement hostile aux “pédophiles”. Ils sont à ses yeux l’ennemi N°1, l’incarnation de la gauche abhorrée, et cela me fait rigoler car j’ai connu, je connais un très grand nombre de “pédophiles” et ils étaient, ils sont presque tous de droite ou d’extrême droite. » (1) Quand il écrit ces mots dans son journal en 2014, les propos de Gabriel Matzneff ne créent pas la polémique. Ils ne le font pas davantage quand ils paraissent dans son ouvrage La Jeune Moabite. Journal 2013-2016, chez Gallimard en 2017.
Depuis fin 2019, l’écrivain est visé par une enquête pour viol sur mineur et sera jugé en 2021 pour apologie de viol aggravé. Son affaire rappelle qu’il y a longtemps eu une apologie de la pédophilie dans les années 70-80. À gauche, avec des tribunes d’intellectuels ou des articles de Libération notamment. Mais aussi à droite. « La question de la défense de la pédophilie n’est pas qu’un truc uniquement lié aux mouvances gauchistes, c’est quelque chose de très transversal politiquement », indique Pierre Verdrager, sociologue et spécialiste de la question de l’apologie de la pédophilie dans la société française, qu’il aborde dans son ouvrage L’enfant interdit, comment la pédophilie est devenue scandaleuse.
Mais après l’affaire Matzneff les critiques ciblent fortement la gauche (2). « Maoïsme, islamisme, pédophilie… Il y a cinquante ans, quand la gauche virait dingo », titre Marianne. « La gauche et la pédophilie, une histoire monstrueuse », lance l’hebdomadaire réac’ Valeurs actuelles. Dans un dossier sur « la terreur » LGBT, le mensuel d’extrême droite l’Incorrect publie un article : « Quand les pédophiles militaient dans les rangs LGBTI ». (...)
Le soutien de la Nouvelle Droite
Les plus fidèles soutiens de Gabriel Matzneff sur ce bord politique sont à trouver au Groupement de recherche et d’études pour la civilisation européenne (Grece), le think tank de la Nouvelle Droite. Christopher Gérard, écrivain de cette mouvance, a été par exemple membre de l’association des amis de Matzneff (3). Et Alain de Benoist, tête pensante du Grece, est aussi un défenseur de l’écrivain. Il lui a consacré un texte dithyrambique, intitulé « L’Archange Gabriel », dans le N°60 de la revue d’extrême droite Éléments, en 1986. StreetPress a pu mettre la main sur cette archive. Il y aborde notamment les penchants pédophiles de l’auteur, qui seraient à l’époque critiqués (...)