
Douze étudiant·es de l’Institut catholique de Vendée comparaissent le 18 juillet devant le tribunal de La Roche-sur-Yon pour répondre d’actes homophobes commis le 18 mai dernier.
Ce samedi-là, à La Roche-sur-Yon, paisible préfecture de la Vendée (55.000 âmes), la manifestation, bon enfant, touche à sa fin. Les diverses associations formant un « village de la tolérance » s’apprêtent à plier stands et banderoles. Soudain, surgissent du fond de la vaste place Napoléon une quinzaine de jeunes, qui fondent sur le rassemblement.
« Ils avaient très bien préparé leur coup, ce n’est pas un mouvement de protestation contre nous qui aurait mal tourné », relate Sophie Proquin-Salacroup, présidente du centre LGBT 85. « Cela fait déjà plusieurs années que l’un d’entre eux vient à chaque fois faire de la provocation, poursuit-elle, et il était dans ce groupe qui a fondu sur notre stand à pas cadencés, comme un raid militaire. Tout était prémédité, on sait qu’ils s’étaient préparés dans un square à côté de la place, et ils sont venus pour en découdre. On sentait leur haine. »
Aux cris répétés de « Homo-folie, ça suffit », le groupe renverse du matériel, arrache ou vole des banderoles pour les brandir comme des trophées et bouscule sérieusement plusieurs bénévoles –certain·es, âgé·es de plus de 70 ans, sont blessé·es dans la cohue. (...)
Agir en plein jour, un samedi, visages non dissimulés, au milieu de la foule et sous les regards des caméras de vidéosurveillance est un procédé inhabituel chez ces extrémistes homophobes, qui préfèrent généralement mener des opérations plus discrètes –ou insidieuses, c’est selon. (...)
Cette fois, les suites ne se font pas attendre. Le procureur de la République diligente une enquête de police dès le 19 mai, et l’agression est fermement condamnée par le préfet et l’ensemble de la classe politique, même la plus à droite. (...)
Image de « fac facho »
Rapidement, il est établi que l’escadron homophobe était composé d’étudiant·es de l’université voisine du centre-ville, l’Institut catholique de Vendée (ICES), lequel a dû faire face à l’évidence et n’a pu se défausser.
Rien de nouveau pour les observateurs locaux, qui depuis des années enregistrent des faits mettant en évidence l’activisme catho-identitaire d’étudiant·es de cette université, ouverte en 1990 sous l’impulsion (entre autres) de Philippe de Villiers, alors président du conseil général de Vendée.
À l’époque, l’homme politique avait un peu forcé la main de l’évêque, dont l’accord était indispensable mais qui rechignait à se lancer dans cette aventure éducative largement subventionnée par le Département –qui offrait même le terrain pour l’édification de « sa » fac. (...)
« On y trouvait quelques Vendéens, mais surtout des rejetons de la bourgeoisie nantaise qui fricotaient avec le FN. Et si à cette époque, l’ICES s’était vu coller l’image de “fac facho”, il n’y avait pas de débordements comme il y a pu y en avoir ensuite », retracent plusieurs anciens.
Eux ont vécu de l’intérieur la bascule opérée à partir de 2010, avec l’arrivée concomitante d’enseignant·es militant·es de droite réactionnaire et d’un évêque tradi envoyé de Paris. (...)
Le terreau était déjà favorable, la loi sur le mariage pour tous a servi de détonateur : « La Vendée a eu le record de nombre de cars de manifestants envoyés à Paris, en 2013, pour la grande manifestation nationale de La Manif pour tous », se souviennent amèrement les militant·es de LGBT 85.
En mai 2013, on assistait également à des scènes nocturnes surréalistes : défilés quasi militaires de jeunes hommes torses nus, flambeaux en main ; les mêmes posant en groupe bien ordonné devant la statue de Napoléon au milieu de la grand’place, en se revendiquant du mouvement des Hommen –baptisé en réaction à celui des Femen.
Effet garanti, d’autant que les participants avaient pris soin de diffuser les images de leurs happenings sur les réseaux sociaux.