
Pour lutter contre la concentration des terres agricoles et la désertification, la commune d’Alloue a monté Terres en chemin. Cette société collective préserve des terres pour des projets d’installation agricole à taille humaine, au bénéfice de la qualité de vie du village.
C’est un mal persistant, profond, qui frappe Alloue depuis une dizaine d’années. « C’est aussi massif qu’une fermeture d’usine, mais ça se fait petit à petit, au fil des ans », rapporte Jean-Jacques Catrain, maire de ce village de Charente. Ici comme ailleurs, les petites fermes disparaissent au profit d’exploitations toujours plus grandes, détruisant les emplois, puis les petits commerces et les services de proximité. Les jeunes vont chercher mieux ailleurs et la population vieillit. « Il y a quatre ans, nous avons fait le constat de la situation économique du village, explique le maire. L’homme de 53 ans, habitant d’Alloue depuis l’enfance, connaît bien sa commune. En dix ans, le nombre de fermes avait été divisé par trois, avec une tendance à la reprise des pâturages par des céréaliers. » Alors, les habitants d’Alloue ont décidé de reprendre la main sur la répartition des terres agricoles et de décider du modèle de développement dans lequel le village évoluerait.
La réflexion collective a mené à la création, en septembre 2016, de la Scic (société coopérative d’intérêt collectif) agricole Terres en chemin. L’entreprise a pour objectif de gérer les terres des agriculteurs partis en retraite pour les mettre à disposition de jeunes cherchant à s’installer. Éleveur bio de vaches laitières depuis trente ans à Alloue, Christian Leduque a pris sa retraite il y a deux ans. À ce jour, il est gérant de la Scic. « Terres en chemin a le statut d’exploitation agricole, explique-t-il. Elle a les mêmes droits et devoirs. Ce qui nous permet d’acheter, de louer, d’exploiter et de vendre des terres. » L’entreprise fonctionne sur le principe de : une personne égale à une voix. La part sociale est de 20 euros et les adhérents ne touchent pas de bénéfices. Ils sont 12 agriculteurs, des syndicats agricoles, la mairie, la communauté de communes, ainsi que des associations du village. Une quinzaine de citoyens ont aussi adhéré en leur nom, hors association. (...)
« Alors qu’un céréalier va vivre sur 200 à 300 hectares, un éleveur laitier qui transforme lui-même peut se satisfaire de 30 à 40 hectares, relève l’ancien agriculteur. Et pour un maraîcher, moins de cinq hectares suffisent. » Mais, la préservation de cette agriculture à taille humaine est menacée par l’évolution de la transmission du métier. « Autrefois, un des enfants reprenait l’exploitation des parents, se souvient le maire. Aujourd’hui, les jeunes souhaitant s’installer en élevage ne sont pas d’ici et viennent de plus en plus souvent de milieux urbains. Cela complexifie la transmission et les céréaliers des villages autour en profitent pour reprendre ces terres et s’agrandir. » (...)
« Alors qu’un céréalier va vivre sur 200 à 300 hectares, un éleveur laitier qui transforme lui-même peut se satisfaire de 30 à 40 hectares, relève l’ancien agriculteur. Et pour un maraîcher, moins de cinq hectares suffisent. » Mais, la préservation de cette agriculture à taille humaine est menacée par l’évolution de la transmission du métier. « Autrefois, un des enfants reprenait l’exploitation des parents, se souvient le maire. Aujourd’hui, les jeunes souhaitant s’installer en élevage ne sont pas d’ici et viennent de plus en plus souvent de milieux urbains. Cela complexifie la transmission et les céréaliers des villages autour en profitent pour reprendre ces terres et s’agrandir. » (...)
Bien sûr, la commune ne peut pas contraindre les agriculteurs partant à la retraite de louer à Terres en chemin. « Notre système dépend du bon vouloir des citoyens, concède le maire. Mais il fonctionne, car c’est dans l’intérêt de tous de vivre dans un village vivant. Et le lien social vient renforcer cela. » Outre les aspects économique et social, c’est leur environnement que les habitants d’Alloue tiennent à préserver. (...)
Pour attirer les jeunes à Alloue, la Scic travaille main dans la main avec l’association d’expérimentation agricole Champs de partage. « Avec cette association, on préconise l’installation progressive, commente Christian Leduque, le gérant de la Scic. Par exemple, il y a actuellement un porteur de projet en apiculture à Champs de partage, qui s’installera ici en fin d’année. Pour être reconnu apiculteur, il lui faut au moins 150 ruches. Il a acheté au début de son test 50 ruches. Il va amener progressivement son cheptel à la dimension économique permettant d’être reconnu. » Champs du partage fonctionne pour le moment dans les quatre départements de l’ancienne région du Poitou-Charentes. Les personnes accompagnées par l’association vont pouvoir se mettre en conditions à Alloue. Certains dans le but de s’y installer et d’autres simplement pour se roder avant de partir ailleurs. Mais la commune accueille également des porteurs de projet souhaitant s’installer sans passer par l’association d’expérimentation agricole. (...)