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En Bretagne, une porcherie géante s’impose à coups de passe-droits
Article mis en ligne le 27 juillet 2022
dernière modification le 26 juillet 2022

Dans le Finistère, l’une des plus grandes porcheries de France pourrait bientôt régulariser son agrandissement. Mais, révèle Splann !, les conclusions de l’enquête publique censées guider le choix des autorités apparaissent largement biaisées.

(...) 27 000 porcs charcutiers produits chaque année. L’infrastructure est située à moins de 300 m du bourg. Baptisée Avel vor, « Le vent de la mer » en breton, elle diffuse pourtant des effluves potentiellement toxiques et parfois malodorantes dans un périmètre où se trouvent école, crèche, commerces, salle de sport, aire de jeux pour enfants, et quartier résidentiel. Son propriétaire déclare émettre chaque année 33,3 à 41,9 tonnes d’ammoniac, un gaz irritant à l’origine de la formation de particules fines.

Deux décisions de justice ont établi que l’exploitation n’aurait pas dû être agrandie. Mais loin de réclamer une diminution du cheptel, le préfet a accordé une autorisation provisoire à Avel Vor et ouvert une nouvelle enquête publique, étape nécessaire avant la régularisation du mastodonte. Contre toute attente, le commissaire enquêteur s’est prononcé en faveur du projet.

Rembobinons le fil des événements.

Une figure de proue de la filière porcine (...)

Cumulant trois postes stratégiques, Philippe Bizien est l’un des protagonistes principaux du lobby porcin. (...)

En 2015, il a demandé une autorisation préfectorale pour porter son cheptel de 8 965 à 12 090 animaux, soit près de 27 000 porcs charcutiers produits par an et 60 tonnes de lisier par jour. C’est plus de quatre fois et demie la taille d’une porcherie hexagonale moyenne.

L’exploitant fait ainsi figure d’exemple pour une filière qui se concentre très rapidement. Entre 2000 et 2019, le nombre de porcheries s’est réduit d’un tiers en Bretagne, tandis que le cheptel ne baissait que de 6 %.

Un environnement dégradé (...)

Dans les années 2010, Laurent a commencé à « remonter les ruisseaux pour comprendre d’où vient la pollution ». Il a constaté que les terres alentours, où sont épandus les lisiers, sont lessivées par les pluies, et que les rivières charrient des cocktails de terre, nitrates, pesticides et bactéries fécales dans la mer. Or ces trois plages sont alimentées par des rivières qui traversent, entre autres exploitations, les terres d’épandage de lisier de la porcherie Avel Vor.

Aujourd’hui, la plage du Château à Landunvez est interdite à la baignade de façon permanente pour raison sanitaire. Celles de Gwisselier et de Penfoul ont fait l’objet d’un arrêté d’interdiction en juin 2022. (...)

Laurent Le Berre, devenu président de l’Association pour la protection et la promotion de la côte des Légendes (APPCL), comme d’autres militants pour l’environnement, pointe du doigt la responsabilité de l’élevage intensif.

L’éleveur, qui rejette les accusations et se dit ouvert au dialogue a refusé de répondre à nos questions. (...)

En avril 2022, la société a été reconnue coupable d’homicide involontaire et Philippe Bizien de négligence concernant la sécurité des salariés. L’exploitant n’a pas fait appel. La famille est en procédure auprès du pôle social du tribunal judiciaire de Brest en vue d’obtenir la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur.

Malgré l’avis défavorable du commissaire enquêteur, et malgré l’accident tragique survenu trois jours plus tôt, le préfet du Finistère Jean-Luc Videlaine a accordé le 1ᵉʳ avril 2016, son autorisation au projet d’agrandissement d’Avel Vor. (...)