
Deux avocats français ont déposé plainte devant la Commission européenne pour 14 migrants afghans, victimes de traitements inhumains en Bulgarie.
Pour les exilés, l’entrée dans l’Union européenne par la Bulgarie s’apparente à l’enfer. Ils sont accueillis comme des chiens, et parfois poursuivis par des chiens sans muselière. Deux avocats français, Olfa Ouled et Clément Père, ont déposé plainte, fin juin, auprès de la Commission européenne et de la commission des Pétitions du Parlement européen contre Sofia pour traitements inhumains dégradants à l’égard des migrants. Pour appuyer leur demande, ils ont collecté 14 témoignages de personnes fuyant l’Afghanistan et qui ont eu le malheur d’arriver en Europe par l’est des Balkans.
« Nous étions une trentaine pour traverser la frontière entre la Turquie et la Bulgarie. Nous avons marché 4-5 jours dans la forêt. Un soir, 10 policiers et 3 chiens sans muselière nous ont arrêtés : ils ont tiré 2 coups de feu et ont lâché les chiens sur ceux qui couraient, ce qui était quasiment impossible à cause de la végétation très dense », raconte l’un d’entre eux dans un témoignage rendu public par les avocats. Il narre ensuite son passage dans le camp de Busmantsi, près de Sofia, la capitale bulgare, où il n’y avait « pas de couverture », où la nourriture était « immangeable ». « Fenêtres cassées, toilettes cassées, douches cassées, je dormais sur le sol », décrit-il.
Un autre témoin, qui a quitté son pays pour « partir plus loin trouver de l’humanité », dit que « la police aux frontières bulgare a lâché les chiens sur nous pour qu’ils nous mordent », avant de renvoyer son groupe vers la Turquie, « sans vêtements ». Il raconte, à son retour en Bulgarie, son passage en prison où les exilés sont « fouillés à nouveau avec les chiens » et « battus avec des matraques électriques ».
LE RESPECT DU DROIT D’ASILE N’EST PAS LE FORT À SOFIA(...)
Les 14 témoins afghans en question ont pu rejoindre la France, mais certains sont aujourd’hui menacés d’être expulsés vers la Bulgarie.(...)
De plus en plus, les tribunaux administratifs français annulent les transferts vers la Bulgarie, qui se montre incapable de traiter correctement les demandes d’asile. (...)
Il reste que d’autres juridictions confirment les expulsions.
Si elle fait suite à la plainte, la Commission européenne, chargée de veiller au bon respect par les États membres des traités, peut dans un premier temps enquêter et demander des explications au gouvernement bulgare, et dans un deuxième temps, si celui-ci ne se conforme pas à ses obligations, porter elle-même l’affaire devant la Cour de justice de l’Union européenne. En cas de condamnation, Sofia s’exposerait à des sanctions. « Avec ces plaintes, nous souhaitons que l’UE se saisisse d’une grave violation des droits humains par l’un de ses États membres », explique à l’Humanité Me Olfa Ouled.(...)
Cette affaire vient illustrer combien est dangereuse la logique qui sous-tend les résultats du Conseil européen des 28 et 29 juin. (...)
avec la suggestion d’installer des « centres contrôlés » dans ces pays pour séparer les réfugiés des migrants économiques promis à l’expulsion. Or, dans certains pays, ces camps existent déjà. En Bulgarie, celui d’Harmanli a fait parler de lui en novembre 2016, quand des centaines de migrants s’y sont révoltés pour dénoncer leurs conditions de vie : promiscuité, mauvaise nourriture, bagarres entre groupes de diverses nationalités. À la suite de cet épisode, des centaines d’Afghans ont été renvoyés dans leur pays. Le procès de 21 émeutiers doit se tenir cet été. Le procès des victimes de la politique anti-migrants du gouvernement bulgare (...)