
La photographe professionnelle Camille Martin Juan était à bord d’un bateau de sauvetage rapide de SOS MEDITERRANEE dans la nuit du 25 octobre, lorsque 56 personnes ont été évacuées d’un bateau en bois à la dérive et en mauvais état. Dans une course contre la montre suite à un appel de détresse, l’équipe de recherche et de sauvetage de l’Ocean Viking a finalement trouvé l’embarcation surchargée, à 36NM au large de Lampedusa, avec deux femmes et près de 30 mineur.e.s non accompagné.e.s à bord.
Ce sauvetage était le cinquième d’une série de six effectués en quelques jours. Cette embarcation, comme les autres, était partie de Libye, dans un acte désespéré pour fuir des cycles déchirants de violence et d’abus. (...)
En suivant le cap donné par l’Ocean Viking et après une longue recherche dans l’obscurité, nous les avons finalement trouvé.e.s. Mais même lorsque nous en étions proches, je n’ai jamais réussi à voir le bateau en entier. Je n’en voyais que certaines parties, lorsque la lampe de poche de notre chef d’équipe l’éclairait ici et là. Des visages émergeaient de l’obscurité de temps en temps, des regards effrayés qui nous fixaient, et puis plus rien, puis la proue du bateau, le bruit de l’eau contre le bois. Je n’ai jamais pu voir la situation dans son ensemble.
Que pouvez-vous faire, en tant que photographe, lorsque vous êtes privé.e de la vue ? Je me suis dit que je devais profiter des torches utilisées par nos deux bateaux de sauvetage rapides alors en mer pour éclairer la scène. Cela signifie qu’il faut attendre et tirer le meilleur parti des quelques secondes où l’on peut voir quelque chose (...)
Cette photographie représente le peu que j’ai vu de ce sauvetage, mais aussi comment ce bateau, et les 56 personnes à son bord, étaient perdus dans l’obscurité avant que nous les trouvions, ressemblant presque à des étoiles dans le ciel. » (...)