
Le Festival international du film de Toronto (TIFF) s’achève alors que les élections fédérales, déclenchées plus tôt cette semaine accaparent désormais les manchettes. Dans les films à l’affiche au TIFF comme dans les débats politiques, un thème commun revient souvent : celui de l’immigration. La façon d’aborder le sujet, elle, diffère pourtant.
Les images qu’elle a tournées montrent des raids répétitifs des services de police parisiens sur la place où ces réfugiés ont élu domicile, collectivement, dans un souci d’entraide et de solidarité, et en l’absence d’une meilleure prise en charge de la part des autorités.
"Très souvent, sur ces questions d’immigration, de migrants, de réfugiés, c’est beaucoup des chiffres, des numéros, des foules, quelque chose d’assez abstrait, un phénomène qu’on va décrire, mais on va rarement aller vers l’individu. Je voulais reconnecter avec ça", explique Hind Meddeb.
Karim Sayad, lui, a trouvé l’inspiration dans son entourage pour réaliser son film documentaire Mon cousin anglais, puisqu’il a suivi son propre cousin, Fahed, qui a quitté l’Algérie pour l’Angleterre en 2001, et s’apprête à retourner vivre dans son pays natal. (...)
De son côté, la réalisatrice Sophie Deraspe avoue qu’au début de l’écriture de son scénario, "on n’était pas dans une telle crise comme on le vit actuellement". Son film Antigone est une adaptation libre et contemporaine de la tragédie grecque du même nom, dont la trame de fond est le combat d’une jeune femme contre l’injustice. (...)
En apportant à sa version des sujets tels que l’intégration d’une famille venue d’Algérie dans la société québécoise, la violence policière, le système judiciaire, les menaces d’expulsion du pays et la volonté de se tenir debout et droit face au pouvoir, la réalisatrice aborde de nombreux débats de société. (...)
Instrumentalisation politique
Tous admettent avoir voulu parler de façon humaine et de proposer des points de vue différents sur un enjeu qu’ils jugent très politisé.
"Il est clair que la majorité des représentations sur la question est souvent simpliste et détournée à des fins politiques et électoralistes", lance Karim Sayad. "C’est une manière de détourner et de ne pas parler des vraies questions", renchérit la réalisatrice de Paris Stalingrad.
« Dans le discours politique, l’imaginaire c’est de nous faire croire que tous nos problèmes viennent des étrangers. »
Hind Meddeb, réalisatrice
Pour Sophie Deraspe, il est aussi question d’un certain "système" dans lequel se trouve notre société. (...)
Une question de temps
Pour les deux documentaristes, ce qui permet au cinéma de raconter différemment ces histoires, c’est la possibilité de prendre le temps.
"Le cinéma nous permet de rencontrer des humanités, de rencontrer l’autre et de prendre le temps de cette rencontre", indique Hind Meddeb.
« Dans les médias, on est dans un rapport d’efficacité, de rapidité, il faut aller vite et on n’a pas le temps, pas le temps de rester avec les gens. »
Hind Meddeb, réalisatrice
Le temps de rencontrer, le temps de produire, mais aussi le temps que le public se donne pour voir ces films. "Si on peut sortir de ce film, se donner le temps de le regarder pendant 1 h 20, et dix minutes après se poser des questions sur la prochaine fois qu’on passera devant un kebab, où qu’on verra ces invisibles qui font tellement dans notre vie quotidienne, et bien, c’est gagné", croit Karim Sayad. (...)