Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
les nouvelles news
Denise Bombardier, la journaliste québécoise qui dénonçait la misogynie française
#femmes #journalisme #feminisme
Article mis en ligne le 9 juillet 2023

Les hommages rendus dans les médias français à la journaliste qui vient de s’éteindre montrent aussi comment ces médias étouffaient la parole féministe.

Au Québec elle est avant tout présentée comme une « intellectuelle et fervente défenderesse de la langue française » qui a eu une longue carrière médiatique.

Dans les gazettes françaises, son nom est associé à celui de l’écrivain pédocriminel Gabriel Matzneff qu’elle a pu dénoncer il y a plus de 30 ans sur le plateau de l’émission Apostrophe avant d’être insultée et boycottée par de grands journaux. Depuis l’annonce de son décès, cet épisode de sa vie tourne à nouveau dans les médias et sur les réseaux sociaux. Comme en 2020, après la sortie du livre de Vanessa Springora Le Consentement, racontant le calvaire que l’autrice avait vécu sous l’emprise de Gabriel Matzneff alors qu’elle était enfant.

Dans cette émission, en 1990, Denise Bombardier tirait la sonnette d’alarme et montrait que le milieu intellectuel parisien faisait passer pour du libertinage ce qui était en réalité de la pédocriminalite. Sur le plateau, tout le monde ricanait et se rangeait du côté de Matzneff qui n’hésitait alors pas à « interdire » à Denise Bombardier de parler. (...)

Elle est ensuite traînée dans la boue par bien des journaux, et, quelques jours après, sur un autre plateau, l’écrivain Philippe Sollers la traite de « connasse ». (...)

Et même en 2020, Josyane Savigneau soutenait toujours Gabriel Matzneff et accusait Denise Bombardier de vouloir faire une « chasse aux sorcières ». L’ex directrice du Monde des Livres n’avait plus voulu chroniquer les ouvrages de l’intellectuelle québécoise après l’émission d’Apostrophe. (...)

Lors de la sinistre « affaire DSK », c’est encore Denise Bombardier qui a réussi à faire entendre la voix féministe sur une grande radio quand tous les médias français tendaient le micro aux amis de celui qui était alors directeur du FMI, lesquels se montraient incrédules et minimisaient la gravité des faits reprochés à DSK. (...)

Exaspérée par l’argument des copains « ce n’est pas l’homme que je connais », elle tranchait : « Il n’y a que les femmes qui savent si les hommes sont violents. » (...)

Mais les médias français mainstream, à l’époque, ont continué à faire régner l’omerta sur les violences sexuelles. Quelques mois plus tard, Denise Bombardier publiait avec la journaliste française Françoise Laborde Ne vous taisez plus ! (Fayard).

Au Canada, Denise Bombardier n’est pas considérée comme une journaliste « féministe ». De l’autre côté de l’Atlantique, le féminisme est intégré, accepté à tel point que les hommages rendus ne mettent pas au centre de sa vie l’affrontement avec Matzneff. (...)

Elle s’amusait de l’arrogance des Français dans sa Lettre ouverte aux Français qui se croient le nombril du monde (Albin Michel). Le Devoir dit d’elle qu’elle était « aussi controversée qu’admirée ».