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Comment Coca-Cola veut faire taire les appels au boycott en Grèce
Article mis en ligne le 28 septembre 2014

Depuis un an, des ex-employés de l’usine Coca-Cola de Thessalonique appellent au boycott des produits de la firme, sans un mot dans les grands médias. Reportage.

« Boycottaz ! ». Depuis près d’un an, une voiture traverse le centre-ville de Thessalonique avec des haut-parleurs hurlants. Tout le monde, dans cette grande ville du nord de la Grèce, est au courant de l’histoire des employés de l’usine Coca Cola.

Septembre 2013, la direction de l’entreprise Coca Cola 3E (la firme grecque de la marque présente dans 28 pays) décide d’une nouvelle vague de licenciements. (...)

La contre-attaque de l’entreprise n’a pas fait, elle non plus, dans la demi-mesure. En justice d’abord, avec une assignation d’urgence pour faire interdire les appels au boycott. La procédure a été déboutée fin août au nom de la liberté d’expression. Un des tracts utilisés par les employés a toutefois été jugé diffamatoire [1]. Une autre plainte, dont le jugement est prévu le 2 février 2017, réclame à 28 travailleurs mobilisés 1 million d’euros et 1 centime au titre du préjudice matériel et moral. (...)

En attendant, Coca occupe les écrans avec une importante campagne de publicité, lancée avant le mondial de football. On y voit des employés épanouis de Coca-Cola 3E et ce slogan, qui fait bondir les ex-salariés : « Coca-Cola 3E est ici et restera ici, dans notre Grèce, pour un avenir meilleur que nous créons ensemble. »

Les salariés s’époumonent. « Coca-Cola 3E a fermé 6 usines d’embouteillement depuis 2004. Elle licencie dans tout le pays. Plus de 2 500 emplois ont été détruits, raconte Vasilis Artemion, président de la fédération régionale du Poeep, le puissant syndicat de l’industrie des boissons qui pilote la lutte. Coca-Cola est le visage du capitalisme. Il laisse des gens à terre sans s’en préoccuper. Nous ne pouvons pas l’accepter. » (...)

les employés font face à un mur de silence dans les grandes chaines de télévision privées et les grands journaux. La presse locale de Thessalonique parle bien des démêlés judiciaires de Coca-Cola avec ses anciens employés, elle publie les communiqués de Coca-Cola, mais reste peu loquace sur la campagne d’appel au boycott.

Une journaliste d’un quotidien régional, qui a signé des articles à ce sujet, réfute toute censure franche. « Personne ne m’a interdit de parler du boycott », dit-elle. Si les articles évoquant Coca-Cola ne sont pas plus fréquents, c’est parce que l’actualité est déjà surchargée par ce type de luttes, justifie la spécialiste des questions économiques. Elle reconnaît toutefois que le sujet n’est pas neutre : « Coca-Cola est de ceux qui payent pour la publicité et qui payent pour nos salaires. Il faut qu’on trouve un équilibre dans notre traitement. Je peux écrire sur ce sujet, mais je ne peux pas écrire tous les jours. » D’autant que le contexte est particulièrement dur. En 2012, la moitié du personnel de son journal a été licenciée et les salaires ont été baissés de 30 %.

Depuis les locaux de l’ex-télévision publique ERT, toujours occupés illégalement après 14 mois de bagarre (lire ici) Stelios Nikitopoulos, membre du syndicat des journalistes de Macédoine et de Thrace, estime clairement que Coca pratique un chantage à la publicité (...)