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Climat scolaire : des personnels qui doutent ?
Jean-Pierre VERAN Inspecteur d’académie (h), formateur, expert associé France Education International (CIEP)
Article mis en ligne le 6 janvier 2020

La première enquête ministérielle sur le climat scolaire dans les établissements secondaires français révèle l’expression d’un mal-être des personnels que confirment d’autres données.

Il suffit de consulter des éditions de la première décennie des années 2000 de dictionnaires de l’éducation, comme celle datée de 2005 publiée par Retz ou celle de 2008 dirigée par Agnès Van Zanten et publiée par les PuF, pour constater la relative nouveauté de la notion de « climat scolaire », absente de ces ouvrages. Il faut sans doute attendre 2012 pour trouver en France un document officiel qui propose définition, effets et conditions d’amélioration du « climat scolaire »[1].

Sept ans après, la DEPP du ministère de l’éducation nationale a publié en décembre 2019 les résultats de la première enquête nationale menée au printemps par ses soins auprès des personnels de second degré[2]. (...)

On pourra tout d’abord constater que l’on s’intéresse ici à la seule perception des personnels. Ni les élèves, a priori premiers concernés, ni les parents ne sont consultés, alors que bien des questions posées les touchent au premier chef, comme par exemple l’opinion sur le fait que les parents sont tout à fait bien ou plutôt bien accueillis dans l’établissement ou que les élèves apprennent tout à fait bien ou plutôt bien dans l’établissement. Il faudra, pour connaître leur avis sur ces questions, consulter d’autres sources, et c’est dommage. Cette focalisation exclusive sur les personnels ne traduirait-elle pas la permanence d’une représentation de l’école où l’élève n’a qu’à suivre, et où les parents sont « laissés sur le paillasson »[3] ?

Mais cette enquête auprès des personnels ne manque pas d’intérêt, notamment quand on est attentif aux opinions qui ne sont pas majoritaires. (...)

Ces quelques données éclairent la manière dont les personnels de l’éducation nationale perçoivent leurs conditions de travail : majoritairement, ils perçoivent leur charge de travail comme excessive, caractérisée par le manque de temps, un climat d’où la violence n’est pas absente, avec des élèves en enseignement prioritaire et en lycées professionnels qui n’apprennent pas bien. Par conséquent, ils sont majoritairement persuadés de ne pas pouvoir exercer ce métier jusqu’à leur retraite.

On peut mettre ces données déclaratives en lien avec d’autres, plus objectives. Selon le bilan social du ministère, par exemple, on est passé, entre 2012 et 2018, dans le premier degré, de 322 à 861 démissions (soit une augmentation pour le moins significative de 167,5%) ; dans le second, de 447 à 538 (soit une augmentation de 20,35%)[4]. Il semble donc que l’augmentation des démissions confirme le « ressenti » exprimé lors de l’enquête sur le climat scolaire. De la même manière l’enquête PISA 2018, menée auprès des élèves de 15 ans, fait apparaître un état préoccupant de la discipline en France : "la France est l’un des pays de l’OCDE où les élèves se plaignent le plus du temps perdu en classe, du fait de problème de disciplines" (sic), indiquait au Ministre français de l’éducation nationale Angel Gurria, en lui présentant le 3 décembre dernier les résultats de l’enquête de l’OCDE[5]. (...)