
Sujets de harcèlements policiers et de discriminations, rejetés avant même d’être accueillis, les roms migrants voient leurs séjours en France rythmés par les expulsions et des conditions de vie précaires. Certaines collectivités décident cependant d’intervenir. Une prise en charge qui est souvent trop limitée. Des « villages d’insertion » au relogement durable, petit panorama des initiatives mises en œuvre en Île-de-France.
Originaires de différents pays d’Europe, les « roms migrants » ont choisi de venir en France, majoritairement pour des raisons économiques et pour y séjourner pendant des périodes plus ou moins longues, voire pour tenter de s’y installer définitivement. La présence de Roms migrants en Île–de–France est très ancienne. Les premiers arrivés, dès les années 1960, venaient des pays de l’ex-Yougoslavie. Une partie d’entre eux parait maintenant intégrée ou, en tous cas est devenue invisible, au sein d’autres communautés tsiganes à Montreuil et aux alentours. (...)
Les bidonvilles dérangent… Les voisins sont choqués. Certains se mobilisent pour qu’on les chasse afin de ne plus voir cette misère. Ou s’indignent que des familles – les femmes et les enfants constituent la moitié des populations migrantes – doivent vivre dans de telles conditions. Des accidents, en particulier des incendies, surviennent régulièrement, plusieurs enfants sont morts ces dernières années. Cette situation interpelle les élus territoriaux, certains sont indignés, beaucoup se disent impuissants et rejettent les responsabilités sur l’État ou l’Europe. (...)
Les premières actions en faveur des Roms migrants ont été engagées par les collectivités locales, souvent sous la pression et parfois avec la contribution des associations et des collectifs de soutien. Elles peuvent consister à apporter une aide minimale aux personnes en situation précaire pour améliorer les conditions sanitaires : ouverture d’un point eau, installation de toilettes provisoires (sanitaires de chantier), mise à disposition de bennes à ordures. Mais beaucoup d’élus restent encore réticents à apporter ce qui devrait être considéré comme un minimum de dignité, au prétexte que cela pourrait pérenniser la présence des familles roms dont ils ne veulent pas sur leur territoire. (...)
Si la diversité des actions d’hébergement et d’insertion est indiscutable, il existe cependant des points communs.
– D’abord, l’entrée par l’habitat est récurrente. De fait, les acteurs institutionnels comme les acteurs associatifs semblent avant tout chercher à résoudre un problème d’hébergement ou de place. Comment expliquer cette insistance ? S’agit–il de suppléer l’absence de l’État, qui en maintenant les mesures transitoires rend quasi impossible toute insertion par l’emploi ? Ou alors d’en finir avec la présence des bidonvilles et la vision de la pauvreté, toujours source de troubles à l’échelle du voisinage ? A moins que le contexte urbain marqué par la raréfaction des ressources foncières et immobilières oblige les acteurs locaux à régler avant tout le problème de la place en ville des migrants roms qui sont presque toujours perçus comme des indésirables ? (...)
– Un deuxième point commun réside dans le fait que les initiatives locales sont fréquemment des bricolages ou des arrangements, qui sont effectués dans l’urgence, le plus souvent suite à un incendie ou à un autre évènement dramatique de ce genre.
Il n’y a pas de planification ou de vision d’ensemble même si l’aide pour l’éradication des bidonvilles votée par la Région Île–de–France en 2005 a probablement constitué un moment important dans la construction des politiques actuelles du bidonville en région parisienne. Aujourd’hui, la vision d’ensemble s’impose néanmoins, ne serait–ce qu’en raison des mobilités qui, largement déterminées par les évacuations de terrain, se réalisent le plus souvent dans le cadre du territoire francilien. (...)
Enfin, la politique de rejet (expulsions des personnes, évacuation des terrains, renforcement des procédures d’exclusion juridique et discriminatoires) constitue toujours l’arrière–plan des initiatives des acteurs locaux, car elle détermine les possibilités effectives d’insertion des migrants et de réussite des projets. (...)