
Les abeilles ne disparaissent pas sur tout le globe, et leur extinction ne menacerait pas nécessairement toute l’agriculture. Tordre le cou à ces croyances alarmistes doit permettre en revanche de mieux comprendre ce que révèlent les pertes sans précédent que subissent les apiculteurs dans certaines régions du monde, et les lourds dangers que portent les mutations profondes des systèmes agricoles.
« Quand j’ai commencé, j’avais 5 % de pertes hivernales. Aujourd’hui, j’en ai 30 % ! », raconte M. Bernard Tiron après trente-cinq ans de métier dans le Valgaudemar (Hautes-Alpes). Depuis les années 1980, la mortalité des abeilles a explosé dans la plupart des régions tempérées du globe : Europe, Japon, Amérique du Sud, Amérique du Nord. Un auteur canadien s’inquiète par exemple pour son pays : « Les taux actuels autour de 25 % sont exceptionnels, et ils seraient catastrophiques d’un point de vue économique s’ils perduraient à moyen terme . » « Vu les conditions aujourd’hui, si j’avais à me lancer dans l’apiculture, je ne le ferais pas », assène M. Tiron en égrenant les difficultés qu’il a vues apparaître : « Il n’y a plus de fleurs dans les prairies, on fauche avant floraison pour pouvoir avoir deux coupes de foin et faire manger du vert aux vaches afin qu’elles donnent le maximum de lait. Les haies disparaissent aussi. » Quelque chose ne va plus dans les champs où vont butiner les abeilles. (...)