
Héroïne pour les défenseurs des migrants, "emmerdeuse" pour le ministre italien Matteo Salvini, Carola Rackete, la jeune capitaine du Sea-Watch, a été arrêtée ce samedi dans la nuit après avoir accosté de force à Lampedusa pour débarquer les 40 migrants qu’elle avait secourus (1).
Après plusieurs heures dans les locaux de la police, Carola Rackete a été placée aux arrêts domiciliaires dans la matinée. Elle doit être entendue par le parquet dans les 48 heures, a expliqué à la presse son avocat, Leonardo Marino, qui l’a trouvée "fatiguée et stressée". (...)
Selon des sources policières citées par les médias italiens, Carola Rackete s’est montrée très calme au poste de police, demandant pardon pour les risques que sa manœuvre a fait courir à la petite vedette et à ses occupants.
Les 40 migrants bloqués à bord depuis 17 jours ont pu néanmoins débarquer peu après 5H30 (3H30 GMT). Après d’intenses échanges diplomatiques, ils devraient être répartis entre cinq pays européens (France, Allemagne, Portugal, Luxembourg et Finlande).
La France prête à accueillir des migrants
La France est prête à accueillir 10 des 40 migrants qui ont débarqué du Sea-Watch 3, un navire d’une ONG allemande, dans la nuit de vendredi à ce samedi dans le port de l’île italienne de Lampedusa, a annoncé le ministère de l’Intérieur. (...)
Pour elle, c’est une question de principe : "Peu importe comment tu arrives dans une situation de détresse. Les pompiers s’en moquent, les hôpitaux s’en moquent, le droit maritime s’en moque. Si tu as besoin d’être secouru, tout le monde a le devoir de te secourir".
Et en mer, "le secours se termine quand les gens se trouvent en lieu sûr".
"Prête à aller en prison"
Assurant respecter scrupuleusement le droit maritime, elle affirme : "Je suis prête à aller en prison pour cela et à me défendre devant les tribunaux s’il le faut parce que ce que nous faisons est juste".
Depuis mercredi, le ministre italien de l’Intérieur, Matteo Salvini, réclamait à hauts cris son arrestation (...)
Les insultes sont également nombreuses sur les réseaux sociaux, mais pas autant que les messages de soutien.
Réactions
"Nous sommes fiers de notre capitaine", a écrit sur les réseaux sociaux le président de l’ONG allemande, Johannes Bayer. "Elle a exactement fait ce qu’il fallait, elle a insisté sur le droit de la mer et a mis les gens en sécurité."
"Les raisons humanitaires ne peuvent pas justifier des actes inadmissibles de violence envers ceux qui portent l’uniforme en mer pour la sécurité de tous", a commenté dans les médias le procureur d’Agrigente (Sicile), dont dépend Lampedusa, Luigi Patronaggio.
En Allemagne, Heinrich Bedford-Strohm, chef de l’Église protestante, donateur de l’ONG Sea-Watch, a dénoncé l’arrestation comme "une honte pour l’Europe", tandis que le chef des Verts, Robert Habeck, assurant que le vrai "scandale" était les noyades en Méditerranée et l’absence d’alternative pour les migrants.
Le ministre allemand des Affaires étrangères, Heiko Maas, a demandé ce samedi après-midi une "clarification rapide" des accusations pesant contre Carola Rackete.
Le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, Jean Asselborn, a appelé ce samedi à la libération de Mme Rackete : "Sauver des vies humaines est un devoir et ne saurait jamais être un délit ou un crime". (...)
sur Twitter : ERIC FASSIN, sociologue
Carola Rackete, capitaine du #SeaWatch3, est l’honneur de l’Europe, et @matteosalvinimi entraîne toute l’Europe dans le déshonneur. Si respecter le droit de la mer et les droits des gens est condamné, il nous faudra bien choisir la désobéissance civile, au nom des droits humains. (...)