
Janvier 2020, Briançon. Il y a deux ans, la région faisait la une des journaux alors que quelques milliers de réfugiés passaient entre Oulx et Briançon au col de l’Echelle. Si la route n’est pas nouvelle, l’augmentation des arrivées en plein hiver en 2017 a poussé les habitants de la région à ouvrir leurs portes aux étrangers de passage. Journal d’un territoire solidaire enclavé.
Briançon est au bord de l’Italie. Quelques kilomètres à pied ou en voiture, une ballade en ski de fond ou en œufs pour les "Européens". Plusieurs heures dans le froid, la neige et la nuit pour les autres. Si le Col de l’Echelle a été beaucoup emprunté ces dernières années, aujourd’hui les migrants sont moins nombreux et passent plutôt par le col de Montgenèvre. (...)
Comme ailleurs en France et en Europe, des personnes, citoyens, aidants, soutiens, bénévoles se sont organisés pour aider les rescapés des montagnes. Des retraités, des paroissiens, des enseignants, beaucoup de professionnels de la montagne agissent. « Ici on sait que la montagne est dangereuse et qu’elle tue. On est né ici, on le sait, on l’apprend gosse. Alors peu importe qu’on soit pour qu’ils restent en France ou non, on ne laisse personne dans la montagne. On ne laisse personne en danger. C’est comme ça. Depuis qu’on sait qu’il y a des gosses qui traversent en tennis, que certains ont perdus des doigts, même des pieds, que certains sont morts là-haut, eh ben on va à leur rencontre juste pour les aider à ne pas mourir. » S. bénévole engagée au sein d’un hébergement collectif pour mineurs scolarisés. (...)
« On dînait chez des amis là-haut quand ça a tapé au carreau. C’était deux jeunes gelés, frigorifiés, perdus, épuisés. Tu as des réflexes, tu réagis sans réfléchir. Ça bouscule. Et puis après tu continues. » M. et C. bénévoles à l’accueil et au repas du Refuge depuis 2 ans. (...)
Le Refuge a ouvert il y a deux ans pour permettre aux personnes de se reposer, de se nourrir, de se remettre de la montagne avant de repartir. Il accueille entre 20 et 100 personnes par nuit. La maison est minimaliste : des matelas sur des sommiers de bois répartis dans 4 chambres, 2 douches, 3 toilettes, une lingerie, un vestiaire d’urgence, une permanence médicale et surtout une grande salle de vie et une cuisine où sont pris tous les repas tous ensemble. Le tout porté par une salariée et plus de 50 bénévoles. (...)
L’ambiance est particulière. D’un côté les arrivants sont des rescapés victorieux qui ont passé une frontière, de l’autre le cauchemar administratif français et l’errance des campements des grandes villes les attend. « (...)
« La question c’est pas de les accueillir ou de ne pas les accueillir. Ils sont là, c’est comme ça, la question de l’accueil ne se pose plus quand ils sont déjà là. On s’en occupe » affirme E. soutien du Refuge depuis le départ. A Briançon, l’hospitalité est une évidence, une mise en action de la politique.