
Et la Mère, fermant le livre du devoir,
S’en allait satisfaite et très fière, sans voir,
Dans les yeux bleus et sous le front plein d’éminences,
L’âme de son enfant livrée aux répugnances.
Rimbaud, « Les poètes de 7 ans »
On était partagé entre la rage et l’hilarité en tombant par hasard à la télé sur le feuilleton de fin d’année, cette invraisemblable mobilisation des médias avec envoyé spécial en direct de Notre Dame des Landes, racontant aux téléspectateurs une histoire de fugue avec parents affolés. Ces géniteurs peu avisés se comportaient comme si leurs filles avaient été enlevées par une secte, alors qu’elles avaient décidé, plutôt que d’aller traîner en boîte ou de se tripoter le portable, de mener à bien un excellent projet de formation politique et culturelle en se rendant sur la ZAD.
Et les commentaires les plus crasseux de traîner sur internet, invoquant un fantômatique détournement de mineures sans aucun fondement juridique ou daubant la présumée étourderie de ces jeunes filles alors que leur détermination raisonnée a été reconnue par le procureur lui-même, … Notons au passage que la forêt de Rohanne et alentours, c’est sûrement, pour des jeunes filles, un des lieux les plus sûrs existant à l’heure actuelle sur le territoire français, tant y sont peu tolérés, par principe, les comportements sexistes et machistes.
La rage l’a emporté quand on a entendu, sans que personne n’y trouve apparemment à redire, que la jeune fille de 17 ans (à un an de la majorité, donc !) a eu droit, à la demande de la justice, à un transport à l’hôpital, à un entretien avec un psychiatre et à un interrogatoire par la police judiciaire. Manquait plus que le test de virginité.
Pour finir, les médias ont mis une sourdine quand Valls a avoué que "ce serait dangereux pour les gendarmes d’essayer d’aller chercher" la demoiselle de 16 ans qui n’a pas voulu se soumettre à l’ordre parental. (...)