
Depuis plusieurs mois, les habitants du Rif, au nord du pays, protestent contre l’injustice et pour de meilleures conditions de vie, dans cette région qu’ils considèrent comme délaissée par le pouvoir. Malgré l’arrestation de ses leaders, le « Hirak » (mouvement) a encore gagné en intensité ces dernières semaines, au fil des manifestations qui s’enchaînent. Inquiet, le gouvernement semble opter pour un nouveau durcissement de la répression. Mais la mobilisation persiste, et pourrait même se diffuser à travers un pays miné par les tensions sociales.
« Malgré les arrestations, ça va continuer. Le Makhzen (l’État, le pouvoir, en langage populaire, ndlr) a utilisé tous les moyens en sa possession, toute sa force. Mais le peuple s’est habitué à cette violence. » Ilias a pris part au hirak (le « mouvement ») dès les premiers rassemblements. Cet étudiant en droit originaire d’Al-Hoceima, militant du Mouvement des jeunes du 20 février – né dans le sillage des révolutions tunisienne et égyptienne – et membre du parti marxiste-léniniste Annahj addimocrati (La voie démocratique), milite depuis le lycée. Alors que la répression se durcissait pendant le Ramadan, il affirmait, catégorique, que ce mouvement social, qui perdure dans le Rif – la zone côtière et montagneuse du nord du Maroc – depuis huit mois, ne s’essoufflerait pas.
Le jour de l’Aïd-El-Fitr, qui marque la fin du Ramadan (lundi 26 juin), la répression est montée d’un cran avec la violente dispersion d’une manifestation à Al-Hoceima, au centre du Rif. Les autorités ont fait passer un message clair. Le roi Mohamed VI est intervenu la veille pour critiquer la lenteur des projets de développement dans la région, et pour blâmer le gouvernement pour son inefficacité, prenant ainsi acte des revendications socio-économiques des habitants. Mais la contestation dans cette région où les relations avec le pouvoir sont historiquement tendues, ne sera pas tolérée.
Le pouvoir craint une contagion (...)
La semaine dernière, un sit-in prévu à Rabat pour dénoncer la répression, et ce que de nombreux observateurs qualifient dorénavant d’ « état de siège », a aussi été empêché. A Nador, dans le Rif, plusieurs personnes ont été blessées. Le gouvernement s’inquiète de cette mobilisation inédite, greffée sur un climat social volatile. Ces dernières semaines, de nombreux rassemblements ont eu lieu à travers tout le pays, faisant craindre une contagion. Le 9 juillet prochain, une marche nationale est prévue à Casablanca.
Depuis fin octobre, les habitants d’Al-Hoceima et des alentours ne décolèrent pas. (...)