
Ils se savent en minorité, mais refusent de cautionner les décisions du gouvernement social-démocrate, à l’égard des réfugiés syriens notamment, au risque de s’exposer à de violentes attaques.
(...) Sur Facebook, le groupe « Les citoyens qui ne soutiennent pas la politique migratoire du gouvernement » rassemble 40 000 personnes. Mais les activistes – ceux qui se mobilisent au quotidien – ne sont que quelques dizaines, assure Lene Kjaer. La cinquantaine, les yeux clairs et les cheveux teints en noir, une cigarette au bec, c’est elle que les réfugiés appellent quand ils ne savent plus quoi faire. Elle donne des conseils, les met en contact avec des avocats et tente de médiatiser leurs dossiers. (...)
Cette ancienne commerçante, actuellement en pension d’invalidité, partage sa vie entre Odense, au centre du Danemark, et une caravane à Copenhague. Son engagement remonte à 2016. Elle découvre alors les conditions de vie déplorables des déboutés de l’asile dans les camps de rétention danois. Il s’agit surtout d’Irakiens et d’Afghans. Mais, en 2019, les autorités commencent à suspendre les permis de séjour des réfugiés syriens, au prétexte que la situation à Damas et dans sa région s’est « stabilisée ». (...)
A l’époque, personne n’en parle. « Je pense que les Danois n’imaginent pas comment nous traitons les réfugiés. Ils font confiance au gouvernement. Ils croient le ministre de l’immigration, quand il dit qu’il n’est pas responsable des décisions prises par l’administration. » Lene Kjaer fulmine : « Au Danemark, nous avons le “hygge” : en gros, les gens veulent juste mener leur vie tranquillement et ils ferment les yeux sur ce qui se passe autour. »
Il faudra un message publié sur Facebook par une lycéenne originaire d’Alep, le 31 mars 2021, pour que la mobilisation commence. Dans une lettre ouverte adressée à Mette Frederiksen, la première ministre, Rahima Abdullah, 20 ans, raconte que son amie Aya, arrivée en 2015 avec sa famille, « n’est plus la bienvenue au Danemark ». Son permis de séjour n’a pas été renouvelé. Au lieu de poursuivre sa scolarité au lycée, elle va devoir se rendre dans un centre de rétention – car le Danemark n’a pas d’accord avec Damas et ne peut pas forcer les réfugiés à repartir en Syrie. (...)