
« L’Afrique aux Africains », c’est ce qu’a déclaré le président Kais Saied lors de son discours au sommet Europe-Afrique à Bruxelles le 17 février 2022. Cependant, les derniers évènements survenus en Tunisie vont à l’encontre de la déclaration du président Kais Saied, au vue de la campagne lancée par l’appareil sécuritaire intitulée « Renforcement du tissu sécuritaire et réduction du phénomène du séjour irrégulier en Tunisie », qui se traduit depuis quelques jours par des vagues d’arrestations massives.
Ces derniers jours, plus de 300 migrants ont été arrêtés, placés en garde à vue et déférés devant la justice. Ils ont été arrêté à la suite d’un contrôle d’identité « au faciès » ou même à la suite de leur présence devant les tribunaux en soutien à leurs proches.
Parallèlement, l’État tunisien fait la sourde oreille sur la montée du discours haineux et raciste sur les réseaux sociaux et dans certains médias et qui visent spécifiquement les personnes migrant.e.s originaires d’Afrique subsaharienne ; ce discours haineux et raciste est même porté par certains partis politiques, qui mènent des actions de propagandes sur le terrain facilitées par les autorités régionales. (...)
Des violations des droits humains sont signalées quotidiennement (...)
Le problème du statut administratif des migrant.es subsaharien.nes présente un défi humanitaire qui nécessite une réponse respectueuse des droits et intégrant les personnes marginalisées, plutôt que des approches sécuritaires répressives.
Dans ce sens, les agissements des autorités tunisiennes vont à l’encontre de leurs obligations en vertu de la Convention de Genève de 1951 relative aux réfugiés, que la Tunisie a ratifiée en 1957, ainsi que de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples. (...)
Les politiques européennes d’externalisation des frontières ont contribué depuis des années à transformer la Tunisie en un acteur clé dans la surveillance des routes migratoires en Méditerranée (...)
Les organisations et associations signataires :
- Condamnent fermement les arrestations arbitraires visant les personnes migrantes d’Afrique subsaharienne.
- Dénoncent les violations des droits humains dont sont victimes les personnes migrantes originaires d’Afrique subsaharienne et appellent les autorités tunisiennes à lutter contre les discours de haine, la discrimination et le racisme envers eux, ainsi qu’à intervenir en cas d’urgence pour garantir la dignité et les droits des migrants.
- Appellent le gouvernement tunisien à respecter ses engagements envers la mise en œuvre des accords internationaux relatifs aux droits des travailleurs migrant.e. s et des réfugié.e.s, ainsi que les recommandations de l’examen périodique universel et du Comité des travailleurs migrants.
- Expriment leur profonde inquiétude quant à la marginalisation des groupes les plus vulnérables, en particulier les personnes migrantes en Tunisie, qui souffrent déjà d’exclusion sociale et vivent dans la pauvreté, privés d’un accès à un travail décent et formel, de toute source de revenus, d’une situation administrative aggrave leur souffrance et les oblige, ainsi que leurs familles, à faire face à des défis qui ne peuvent être surmontés que par l’intervention courageuse du gouvernement pour les aider.
- Exigent la protection et la garantie des droits des migrants et le respect de leur dignité, et les autorités tunisiennes doivent mettre fin à l’exploitation à laquelle ils sont confrontés au travail. Prendre ces mesures bénéficiera également au marché du travail tunisien, où les migrants représentent une force innovante capable de dynamiser l’économie nationale s’ils sont traités avec des lois et des politiques d’emploi justes et respectueuses des droits de l’homme.
- Renouvellent l’appel au gouvernement tunisien à assumer cette responsabilité historique et à déployer tous les efforts à mettre en œuvre un cadre de régularisation des migrants présents sur le territoire tunisien, répondant aux différents appels de la société civile et éliminant les craintes des organisations nationales et des associations qui les ont exprimées depuis des années concernant l’exploitation et la vulnérabilité des travailleurs non réguliers en Tunisie.
- Soulignent la nécessité de mettre à jour et de développer un cadre légal relatif à l’immigration et à l’asile pour le rendre conforme aux normes internationales, ainsi que de donner la priorité au lancement d’une stratégie nationale d’immigration qui garantisse l’intégration et la protection des droits
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Tunisie : Halte a la dérive raciste et sécuritaire
Non au discours haineux prôné par les plus hautes autorités tunisiennes !
Secouée par une dérive autoritaire sans précédent, la Tunisie vient de franchir un nouveau pas dans l’inadmissible : l’adoption par le chef de l’Etat et le conseil national de la sécurité d’une série de mesures découlant directement de thèses racistes et xénophobes qui visent les migrant(e)s subsaharien(ne)s. (...)
Cette dérive raciste, déclenchée par une minorité, est un coup porté aux aspirations de la révolution fondée, faut-il le rappeler, sur les valeurs de liberté, de justice, d’égalité et de dignité.
Portée dans un premier temps par quelques groupes et relayés par certaines pages des réseaux sociaux proches du pouvoir tunisien, cette campagne reprend à son compte les pires travers des idéologies et des thématiques prônées par les mouvements identitaires et d’extrême-droite en Europe et aux Etats-Unis. (...)
Nous, Tunisien(ne)s vivant à l’étranger qui, à un moment ou un autre de notre parcours dans les pays d’accueil, avons été confrontés aux discours xénophobes et actes racistes, pouvant même parfois aller jusqu’à l’assassinat, nous ne pouvons admettre qu’en Tunisie se diffusent et se banalisent aussi facilement des discours haineux et racistes.
Nous comptons sur la solidarité active de toutes celles et tous ceux qui ont toujours lutté contre le racisme et la xénophobie et les appelons à faire barrage avec nous à cette ignominie et à nous aider dans notre combat pour une Tunisie libre, démocratique et accueillante.
Nous exigeons
l’arrêt des poursuites et arrestations arbitraires contre les migrant(e)s subsaharien(ne)s
La libération immédiate des migrants arrêtés
La dénonciation des propos et actes racistes et l’application de la loi 2018-50 (anti raciste) du 23 octobre 2018.
- Nous appelons tous les démocrates et la société civile en Tunisie à condamner sans réserve ce nouveau discours officiel étranger à notre histoire et à notre culture et ces campagnes haineuses et xénophobes.
- Nous les exhortons à manifester leur solidarité active aux migrants subsahariens.
- Nous appelons les Tunisien(ne)s en France et à l’étranger de dénoncer activement le racisme et la xénophobie dans notre pays
- Nous appelons tous les démocrates en France et en Europe au soutien et à la solidarité
Le racisme n’est pas une opinion, c’est un délit ! Il doit être combattu !
Manifestation de soutien aux migrants sub-sahariens en Tunisie
Rassemblement Vendredi 3 Mars 2023 17h-19h
Ambassade de Tunisie à Paris
Place André Tardieu 75007
Métro Saint Francois Xavier, Ligne 13