
À l’époque où Alain Morvan est débarqué de son poste de recteur de l’académie de Lyon, le terme de lanceur d’alerte n’est pas encore entré dans le langage courant. Et pourtant, il en aurait assurément mérité le titre. Après une année à s’opposer au projet d’installation du groupe scolaire Al Kindi à Décines-Charpieu, dans la métropole lyonnaise, ce spécialiste de la littérature anglaise s’est vu remercier sans ménagement le 21 mars 2007, un mois tout juste avant le premier tour de l’élection présidentielle. Ce qui ne doit rien au hasard, selon son récit.
D’abord « liée à de simples questions techniques et des considérations juridiques » son opposition à l’encontre de l’installation du centre Al Kindi évolue par la suite vers la défense de la laïcité et les risques d’intégrisme religieux qu’il juge inhérents à ce projet. Douze ans après, les révélations de Marianne sur Nazir Hakim, le président du groupe scolaire Al Kindi, et sa proximité avec une organisation suédoise (The Commission for the Protection of Civilians) qui a procuré des armes à Al-Qaïda en Syrie, confirment ses multiples alertes émises lorsqu’il était en poste.
Une position qui a déclenché les foudres de « l’appareil d’État » pour le faire taire. La raison, selon Morvan ? Parce que le ministre de l’Intérieur de l’époque, Nicolas Sarkozy, jouait « clairement la carte communautaire pour consolider sa future candidature à la présidentielle ». Et parmi ceux qui ont tenté de faire rentrer le recteur dans le rang, un certain Jean-Michel Blanquer… actuel ministre de l’Éducation nationale, qui était alors directeur adjoint du cabinet de Gilles de Robien, alors à la tête de ce même ministère. « Le Jean-Michel Blanquer que j’ai connu est très loin de l’image qu’il s’est construit aujourd’hui », souffle-t-il. Son histoire, il la couchera dans un livre paru en 2008, L’Honneur et les honneurs. Souvenirs d’un recteur « kärcherisé » (Ed. Grasset). Pour Marianne, Alain Morvan a accepté de se replonger dans ses vieux souvenirs et de rappeler « les lâchetés » des uns et des autres, au grand dam des principes républicains. (...)
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– 2017 Innovantes ou réac ? 5 questions sur les écoles Espérance banlieues
On y chante la Marseillaise la main sur le cœur, on y lève le drapeau, on s’y vouvoie et l’on y porte un uniforme. Vert pour les garçons, rouge pour les filles. Pour lutter "contre le décrochage scolaire" et pour "l’intégration" dans les banlieues, le réseau des établissements scolaires privés Espérance banlieues présente un emballage tradi à faire pâlir d’envie les nostalgiques de l’école IIIe République.
Ses huit écoles, hors contrat, sont un fait minoritaire dans le paysage éducatif : elles accueillent 350 des 12 millions d’écoliers français. Pourtant, depuis l’ouverture de la première à Montfermeil en 2012, elles suscitent beaucoup d’intérêt. Celui des médias – Mélissa Theuriau y a tourné un documentaire, BFMTV les qualifie de "miracle éducatif", les reportages sont élogieux... Et aussi celui des politiques. (...)
Le mouvement En Marche ! d’Emmanuel Macron enfin, a mis un pied dans le débat sur le hors contrat en conviant à sa convention sur l’éducation le fondateur et président de la fondation Espérance banlieues, Eric Mestrallet.
Cette "nouvelle offre" est pourtant loin de faire l’unanimité. Ses détracteurs voient dans ces écoles aux méthodes alternatives la vitrine médiatique d’un milieu catholique traditionaliste œuvrant pour le développement du hors contrat. A Orléans, l’ouverture annoncée pour la rentée 2017 d’une école Espérance banlieues a été dénoncée par le syndicat Sud Education, comme les premières pierres d’une "entreprise idéologique de vaste ampleur qui vise à casser le service public d’éducation et créer un marché scolaire juteux". Espérance banlieue, "Miracle" ou cheval de Troie ?
Comment fonctionnent ces écoles ?
Il existe huit établissements hors contrat Espérance banlieues. Ils ont été créés dans des quartiers jugés "en grande urgence éducative" par la fondation : Montfermeil, Asnières-sur-Seine, Marseille, Roubaix, Mantes-la-Jolie, Sartrouville, Pierre-Bénite et Saint-Etienne. Les écoles ne reçoivent pas de subvention directe de l’Etat, ne sont pas tenues d’appliquer les programmes scolaires et recrutent les professeurs qu’elles souhaitent.
Présentées comme aconfessionnelles, elles accueillent les élèves du CP à la 3e et sont payantes (50 à 75 euros par mois pour le premier enfant selon leur site). Les cours sont dispensés en petits effectifs – 15 élèves par classe contre 23 en moyenne dans le public en élémentaire –, par des professeurs qui sont "plutôt des éducateurs", et qui "pratiquent la pédagogie positive", précise Eric Mestrallet. (...)
Grégory Chambat, professeur dans un collège de Mantes-la-Ville et auteur du livre "L’école des réac-publicains", voit pourtant la démarche d’un autre œil : "Ces écoles surfent sur ce qui ne fonctionne pas dans l’école publique", comme les effectifs trop élevés, le manque de moyens ou la difficulté à réduire les inégalités entre les élèves. Et sur les discours sur le "déclinisme scolaire", qui décrivent une école française décadente, en proie aux "pédagogismes" et qui nécessiterait d’être redressée.
Qui est derrière ?
Pour faire sa publicité, le réseau peut compter sur plusieurs mascottes : Harry Roselmack, qui a co-signé avec le président de la fondation Eric Mestrallet un livre-manifeste, l’auteur Alexandre Jardin ou Jamel Debbouze, qui vante sur Twitter une école aux "résultats incroyables".
Mais derrière ce "miracle éducatif", on trouve aussi un réseau catholique traditionaliste engagé dans le développement des écoles hors contrat.
Le fondateur et directeur Eric Mestrallet est l’ancien attaché parlementaire du sénateur Bernard Seillier, un proche de Philippe de Villiers (Mouvement pour la France), engagé avec Civitas contre le mariage pour tous. Espérance banlieues est abritée par la Fondation pour l’Ecole, donc Eric Mestrallet est aussi le vice-président. Celle-ci est dirigée par Anne Coffinier, décrite comme "une égérie de la Manif pour tous". La quasi totalité des membres de son conseil d’administration sont proches de ce mouvement ou des milieux traditionalistes.
Dans son collège des personnalités qualifiées, on trouve par exemple Jean-Michel Schmitz, ancien cadre de Larfarge et ancien président d’Ichtus, "institut catholique traditionnaliste héritier de la Cité catholique, un mouvement d’extrême droite ’contre-révolutionnaire’", écrivait "Le Monde" à l’époque où la Manif pour tous battait le pavé en 2013.
Pour s’installer dans les communes, la fondation cultive aussi son réseau. (...)
Les inspections menées par l’Education nationale dans certaines écoles du réseau n’ont pas mené à des "alertes majeures", indique au "Monde" une source proche de l’inspection. Celle-ci précise au quotidien que "ce qui interroge, c’est leur posture coloniale : il s’agit bien d’enraciner culturellement ces enfants, avec le présupposé qu’ils seraient des petits sauvageons élevés dans le désamour de la patrie".
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Qui les finance ?
Les écoles privées hors contrat ne touchent pas de subvention de l’Etat et les frais d’inscription sont peu élevés. La participation des parents représente 15% du budget des écoles Espérance banlieue, selon leur site. Comment alors ces écoles bouclent-elles leurs budgets ? Le reste du financement est apporté par la Fondation pour l’école ou par "des donateurs, des entreprises qui voient une raison d’espérer", nous explique Eric Mestrallet. Il cite L’Oréal, Vinci et "des fonds d’investissement". (...)
Comme la Fondation pour l’école a été reconnue "d’utilité publique" en 2008 – François Fillon était Premier ministre et Xavier Darcos ministre de l’Education nationale – ces opérations de mécénat bénéficient de déductions fiscales qui agissent comme une subvention indirecte aux activités de la fondation.
"C’est de l’argent public détourné", s’agace Grégory Chambat :
""Ces entreprises ont des réductions de charges pour financer des écoles qui ont 15 élèves par classe alors que nous sommes 30 dans le public.""
L’Etat participe indirectement au fonctionnement des écoles par un autre biais : la fondation Espérances banlieue indique en effet sur son site qu’il est possible de se faire engager dans ses écoles dans le cadre d’un service civique. Soit 6 à 10 mois de "service" rémunérés par l’Etat. Une annonce a aussi été postée sur le site officiel du service civique. Intitulé de la mission : "Accompagner les élèves et les familles dans les apprentissages et l’ancrage citoyen". (...)
– novembre 2017 Espérance Banlieues : le ministère de l’Éducation alerté
A leur lancement il y a six ans, elles avaient obtenu le soutien de personnalités comme Jamel Debbouze, ou Harry Roselmack : les écoles privées de la fondation "Espérance Banlieues", qui s’adressent aux jeunes de quartiers populaires, suscitent aujourd’hui d’importantes interrogations. (...)
Les conseillers régionaux Front de Gauche d’Île-de-France viennent de faire parvenir une lettre alertant le ministre de l’ Éducation nationale à ce sujet. Ils dénoncent un projet traditionaliste, inefficace et bénéficiant d’un financement public qu’ils estiment illégal.
Le crédo de ces écoles Espérance Banlieues : apporter une réponse au fléau du décrochage scolaire en France, notamment dans les quartiers populaires. (...)
des voix s’élèvent pour dénoncer un modèle faussement innovant et signaler le niveau très bas des élèves qui sortent de ces écoles. À Montfermeil, Jordi Le Cointe, professeur de SVT au lycée Pablo Picasso, fait partie des enseignants membre du réseau national d’alerte autour de la fondation Espérance Banlieues, qui vient d’être lancé. Dans cette ville de Seine-Saint-Denis, où la première école du réseau a été ouverte en 2012, certains élèves ont rejoint les bancs du public. Ils sont aujourd’hui deux à quatre par classe dans son établissement (soit environ 10 % de l’effectif total du lycée).
"Lorsqu’un élève vient d’un établissement hors contrat, il doit passer des tests. Or aucun élève venant de cette école n’a jamais réussi les tests chez nous. On a été surpris de voir les lacunes de ces jeunes. Ceux que nous voyons arriver n’ont jamais fait de physique-chimie par exemple. Ils ont appris les sciences et vie de la terre de manière très naturaliste. Dans les cours auxquels nous avons eu accès, tout est pétri d’une certaine morale catholique. Ils n’ont aucun esprit critique et sont en grande difficulté" explique Jordi Le Cointe.
Etrange jeu d’eau
À Marseille, plusieurs mères d’enfants inscrits au Cours Frédéric Ozanam de la fondation Espérance Banlieues dénoncent un mélange des genres. Trois ont même porté plainte, notamment pour abus de confiance. L’une d’elles, jointe par téléphone, raconte une étrange scène qui s’est déroulée à la fin de CM2, au cours de laquelle son enfant s’est fait "asperger d’eau" avec un "drap blanc" et donner une "bénédiction". Un simple "jeu d’eau" pour fêter la fin de l’année, répond le directeur de l’école, qui dénonce des "témoignages farfelus".
Pour Paul Devin, secrétaire général du syndicat des personnels d’inspection de la FSU et inspecteur de l’Éducation nationale, il est temps en tout cas que le ministère de l’Éducation Nationale enquête et se prononce sur ce sujet.
"Il y a le problème de la qualité de l’enseignement et un risque de manipulation et d’endoctrinement, parfois insidieux mais bien réel", selon Paul Devin. "Ces écoles, c’est une expérimentation. Il y a une dimension politique, des liens avec LR particulièrement visibles dans les communes d’implantation de ces écoles. Mais aussi avec La Manif pour Tous. L’une des fondatrices du mouvement de la Manif pour Tous est aussi l’une des fondatrices d’Espérance Banlieues"
Autre point sur lequel le gouvernement est alerté : la question des financements accordés par des conseils régionaux à cette fondation d’écoles privées : 50.000 euros il y a une dizaine de jours de la région Ile-de-France dirigée par Valérie Pécresse, 260.000 euros il y a quelques mois de la région Auvergne-Rhones Alpes, dirigée par Laurent Wauquiez. Or le courrier adressé à Jean-Michel Blanquer note que des écoles privées hors contrat ne peuvent être financées avec de l’argent public. Un financement "illégal" selon les auteurs de cette lettre. (...)
– 2018 Une laïcité peu orthodoxe
Dans la cité champenoise, l’installation d’une école Espérance Banlieues au sein d’un établissement public fait des remous. (...)
A la rentrée prochaine, la cour de récré de l’école élémentaire Barthou, implantée dans les quartiers de Reims et classée en réseau d’éducation prioritaire renforcé (REP +), sera coupée en deux. D’un côté du grillage vert, fraîchement installé, le bâtiment de l’école publique. Sur ses fenêtres s’affiche en grosses lettres "Liberté, égalité, fraternité, laïcité". Il continuera d’accueillir ses élèves, comme aujourd’hui.
De l’autre, dans une partie des locaux du groupe scolaire, aujourd’hui vacants, s’installera le cours Colibri, issu du réseau Espérance Banlieues. Ces écoles privées hors contrat ne se reconnaissent pas comme "laïques", mais se disent "aconfessionnelles". Elles se sont donné pour mission de "lutter contre l’échec scolaire et de transmettre le meilleur de la culture française" et se distinguent par leurs méthodes "à l’ancienne" : levée de drapeaux le matin, apprentissage de La Marseillaise, uniforme vert pour les garçons et violet pour les filles, corvées de vaisselle, vouvoiement de rigueur... (...)
Un enseignement jugé "innovant" et "salutaire" par ses défenseurs. Mais perçu comme "réac" et "dangereux" par ses détracteurs, notamment par le Comité départemental d’action laïque (qui regroupe des délégués rémois de l’Education nationale, ainsi que des syndicats de parents d’élèves et d’enseignants). "Des écoles privées hors contrat, il y en a déjà à Reims, cela ne nous a jamais posé de problème. C’est le fait qu’Espérance Banlieues s’installe ici, au coeur d’une école publique, qui est pour nous inacceptable et vécu comme une provocation !" explique Aline Geeraerts, présidente de l’UNSA Education de la Marne. "Nous sommes complémentaires, puisque nous touchons les élèves en situation de décrochage, notre but étant de les ramener sur les bancs de l’école", rétorque Alix Pelletreau, présidente de l’antenne rémoise d’Espérance Banlieues.
Des réseaux proches des milieux catholiques (...)
Depuis sa création, en 2012, l’association Espérance Banlieues a essaimé. L’école de Reims sera la douzième à ouvrir ses portes en France. "Développer un modèle d’école spécialement adapté aux besoins des banlieues et instruire chaque enfant de manière rigoureuse et structurée", telle est l’ambition affichée. "L’idée étant d’avoir de petits effectifs - environ 15 élèves par classe -, d’assurer un suivi permanent et personnalisé, d’impliquer au maximum les parents pour les aider à remplir pleinement leur rôle d’éducateurs", explique Alix Pelletreau. (...)
En avril 2016, l’actuel ministre de l’Education nationale, Jean-Michel Blanquer, était intervenu lors d’un colloque d’Espérance Banlieues. "Le projet rassemble, à mes yeux, les ingrédients de ce qui réussit dans le système scolaire", avait déclaré celui qui était encore alors directeur de l’Essec. Depuis son arrivée Rue de Grenelle, l’homme se fait plus discret sur le sujet. (...)
Ce qui met en émoi les opposants à l’implantation d’Espérance Banlieues, ce sont avant tout ses réseaux, proches de certains milieux catholiques. L’association fut initialement abritée par la Fondation pour l’école, dirigée par Anne Coffinier, l’une des égéries de la Manif pour tous. Et le fondateur d’Espérance Banlieues n’est autre qu’Eric Mestrallet, ex-attaché parlementaire de Bernard Seillier, vice-président du Mouvement pour la France de Philippe de Villiers. Enfin, c’est à Montfermeil, en Seine-Saint-Denis, dans la ville de Xavier Lemoine, vice-président du Parti chrétien-démocrate de Christine Boutin, que la première école avait ouvert ses portes en 2012... (...)
Un enjeu politique ?
Avant Reims, Espérance Banlieues s’est implantée à Montfermeil, Asnières, Sartrouville, Mantes-La-Jolie, Roubaix, Saint-Etienne, Angoulême, Pierre-Bénite, Marseille, Argenteuil, Angers... Onze villes, toutes dirigées par des maires de droite. Dans certaines de ces communes, l’opposition n’a pas manqué d’agiter le chiffon rouge, accusant la majorité de favoriser l’implantation de ces écoles censées ne fonctionner qu’avec des fonds privés.
Lors du conseil municipal de la cité champenoise, le 5 février dernier, le premier magistrat Arnaud Robinet (LR), a ainsi dû répondre aux attaques de l’élu socialiste Eric Quénard. "Le maire s’était engagé à ne pas verser un centime d’euro à l’association. Or, bien que celle-ci en possède déjà les clefs, elle ne commencera à verser un loyer qu’à partir du 1er septembre prochain. Elle bénéficie donc de six mois de loyer gratuit, soit un total de 7 110 euros, explique-t-il. Par ailleurs, la pose du grillage destiné à séparer le terrain, mais dont l’école publique n’a jamais eu besoin pour fonctionner, aura coûté 41 000 euros à la ville !" (...)
D’autres failles juridiques sont mises en avant par l’opposition municipale qui a saisi le tribunal administratif. Mais Alexandre Mora, le directeur de cabinet du maire, se dit serein. (...)
Opacité sur les programmes et les résultats (...)
Autre point de discorde : pour exercer dans une école Espérance Banlieues, aucun diplôme ni formation spécifique ne sont exigés. Mais c’est le propre de ces établissements hors contrat de procéder eux-mêmes au recrutement des enseignants et de les rémunérer directement. Leur position par rapport à la place des religions à l’école ne semble pas toujours comprise non plus. "Espérance Banlieues se dit "aconfessionnel", mais la plupart du personnel est catholique, tout le monde le sait. On a l’impression qu’ils avancent masqués ; ce que l’on craint, c’est le risque de prosélytisme", explique Luc Jan, président de la FCPE de Reims. (...)
"Chez nous, la religion n’est pas taboue. Il nous paraît difficile de demander à nos élèves, en grande partie musulmans et dont la vie est rythmée par la religion, de taire leurs croyances." Et que pense-t-elle de ces articles de presse qui évoquent la présence de crèches à Noël, de prières chrétiennes affichées en salles des profs, de noms de saints donnés à des médailles ? "Si certains enseignants éprouvent l’envie de se réunir entre eux pour une petite prière avant de commencer les cours, pourquoi pas", répond-elle.
Malgré toutes ces divergences, Alix Pelletreau espère bien établir un dialogue - pour l’instant inexistant - avec le corps enseignant de l’école voisine. Les deux établissements partageront la même entrée, le même terrain de basket, les factures d’électricité et de chauffage... "Incroyable ! Ce n’est pas à l’école publique de s’adapter, s’agace Aline Geeraerts, de l’Unsa Education de la Marne. Beaucoup d’enseignants se disent inquiets, à juste titre." Ultime ironie du sort : il y a deux ans, l’école Barthou avait gagné un concours sur la laïcité. Un arbre avait été symboliquement planté dans la cour, à cette occasion, en présence des élus locaux. Or ce fameux arbre se trouve aujourd’hui du côté de l’école Espérance Banlieues. De quoi attiser encore un peu plus les tensions.
– Polémique autour de l’école privée présidée par la belle-fille d’Emmanuel Macron
Tiphaine Auzière, la fille de Brigitte Macron, se défend de tout lien avec Pascal Gauchon, ancien dirigeant de la formation d’extrême droite d’inspiration néofasciste Parti des forces nouvelles et professeur de géopolitique en classe préparatoire. (...)
« Monsieur Gauchon n’a rien à voir avec nous, et je condamne toute forme d’extrémisme. » Tiphaine Auzière tente d’éteindre la polémique naissante autour de l’école qu’elle vient de lancer. La fille de Brigitte Macron préside un établissement privé hors contrat qui tient sa première rentrée dans le 16e arrondissement parisien. Un lycée baptisé Autrement s’enorgueillissant de pouvoir faire passer le bac en deux ans et mis à l’honneur par Le Canard enchaîné dans son édition du 21 octobre.
L’hebdomadaire y révèle en effet le CV d’un des professeurs de la prépa du même nom : Pascal Gauchon, enseignant la géopolitique à la Prépa Autrement et qui fut un « dirigeant du Parti des forces nouvelles, situé à droite de la famille Le Pen ». Soit, dans les années 1970, le leader d’un parti d’extrême droite d’inspiration néofasciste, éphémère concurrent du Front national, et dont les troupes comptèrent des références encore cruciales dans la mouvance radicale actuelle, comme Jean Raspail.
Ajoutons à cela que Pascal Gauchon fut un militant actif d’Ordre nouveau ou encore rédacteur en chef de Défense de l’Occident, la revue du « socialisme national » de Maurice Bardèche, après l’assassinat de François Duprat. Une figure de l’extrême droite française d’alors, qui échoue en 1981 à recueillir les signatures pour se présenter à la présidentielle et compte aujourd’hui parmi les membres du conseil scientifique de l’école de Marion Maréchal ex-Le Pen. Pas la biographie la plus commode, en somme, pour figurer dans le nouveau projet de la belle-fille d’Emmanuel Macron.
« Aucun lien juridique »
Mais Tiphaine Auzière insiste : elle préside le lycée Autrement. Rien à voir avec la prépa du même nom lancée au même moment dans des interviews parfois croisées, qui partage les mêmes locaux, certains professeurs et une partie de la direction, puisque Christophe Cadet est à la fois secrétaire général du lycée et directeur de la prépa. « Nous n’avons aucun lien juridique », appuie Mme Auzière. (...)