
A Marseille, la chaleur tombe drue. Fuyant le bitume, les habitants se réfugient sur les rivages de la cité phocéenne. Un littoral qui devrait, à terme, être sérieusement grignoté par la montée des eaux. Qu’en pensent les habitués de la très populaire plage des Catalans, située à dix minutes du Vieux Port ?
(...) Vous voyez le rocher là-bas ? Eh bien le sable allait jusqu’à lui dans les années 70. Aujourd’hui il est à plus de cinq mètres du bord. » (...)
Ont-ils entendu parler du réchauffement climatique et de ses conséquences ? « Bien sûr on suit, le trou dans la couche d’ozone, le Pôle Nord qui décongèle, tout ça. A la télé, on en entend parler. Mais ça craindra dans très très longtemps. Il paraît que les pays d’Afrique pourraient être un jour plus froids que ceux d’Europe », avance Mohamed. « On ira au bled faire du ski ! » rebondit Tarif.
Je leur fais part des observations de Joël sur l’érosion de la plage. « Ah mais c’est rien, 5 ou 10 mètres en quarante ans ! Quand j’aurai 60 ans, elle sera ici, à mes pieds », imagine Tarif. « Et tes enfants, tu y penses ? », lui reproche Arafet, avant de poursuivre : « Les politiciens, ils ne pensent qu’au pétrole. » « Et puis bon, chacun ses problèmes. De notre côté, il faut survivre au quotidien, gagner de l’argent. On n’a pas le temps de penser à la nature », conclut Mohamed, sans espoir. (...)
« Quand on voit l’état de saleté de l’eau ici, on pense au sixième continent de plastique créé par l’homme », observe Jean-Marie. « Quand tu plonges, tu as l’impression que tu vas ressortir avec un pot de yaourt sur le nez ! », témoigne Manuel.
« Dans les années 70, des scientifiques ont essayé d’alerter tout le monde sur le réchauffement climatique. A l’époque, il était encore possible de ralentir, de changer nos habitudes. Aujourd’hui c’est mort, c’est foutu », estime Jean-Marie, avant d’ajouter : « C’est aux grands groupes de faire des efforts, ce sont eux qui polluent le plus. Mais les patrons, ce qu’ils veulent, c’est faire du profit. La planète, ils s’en fichent. Après eux le déluge… » (...)
on entend de l’inquiétude mêlée à un sentiment d’impuissance. « A chaque fois que les pays passent des accords, c’est pour dans vingt ans ! Et ça me rend folle. Ils ne font aucun effort réel. Il y aurait sans doute moyen d’utiliser des sources d’énergie moins polluantes que le pétrole, mais il y a tellement d’argent en jeu, les Etats ne font rien… », observe Véronique, avant de me lancer un défi : « Avant qu’on n’ait plus de plage, allez donc prendre un petit bain ! » (...)
« On se sent très mal informées sur ces questions », regrette Carmen, qui a « vaguement » entendu parler du réchauffement climatique. « Les gens ne se sentent pas du tout concernés par tous ces changements. Il y a des signes, mais c’est plus tard que ce sera grave. Les personnes les plus haut placées devraient nous passer des messages clairs, mais elles ne le font pas », conclut Sophia.