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Rue89 Bordeaux
A Bordeaux-lac, les réfugiés survivent les pieds dans l’eau
Article mis en ligne le 24 octobre 2019

Les réfugiés qui dorment sous des tentes, au bord du lac de Bordeaux, ont désormais les pieds dans l’eau. Soixante-dix personnes, dont des familles avec enfants, survivent ainsi depuis cet été sans sanitaires ni eau courante. Un rassemblement de soutien s’est tenu ce mardi pour dénoncer la situation qui devient critique avec la pluie.

Une mobilisation, à laquelle appelaient le Collectif de soutien aux expulsé.e.s de Gironde et de nombreuses associations et syndicats tels que Areve, Bienvenue, la CNT, Solidaires, Le Planning familial, le Collectif des Migrants de Bordeaux, Sud Santé 33, Sud PTT 33, La Cimade, Ovale citoyen… (...)

Une situation critique depuis déjà une semaine

Près d’une des tentes, assis sur des chaises de camping et abrités sous un vieux parasol décoloré, un groupe de réfugié tente de se réchauffer auprès d’un feu. « Le terrain a déjà été inondé sept fois et personne ne bouge ! » tempête alors Annick, une bénévole qui intervient régulièrement sur le campement. Lors de l’épisode de violents orages et de rafales de vent lundi dernier, la Gironde avait même été placée en vigilance orange. (...)

Tandis que les militants et les réfugiés échangent, serrés sous les parapluies, un garçonnet traverse alors le terrain sur son vélo, un sac plastique sur le dos en guise d’imperméable. « Ici, il y a même un bébé de 11 mois ! » lâche Annie* (les prénoms avec * ont été modifiés sur demande des intéressés) , une militante du Réseau éducation sans frontière (RESF), ulcérée d’avoir l’impression de se battre contre des moulins à vent. En absence de logement, face à la lourdeur administrative et à l’approche de l’hiver, certains parents ont abandonné l’idée d’essayer de scolariser les enfants.
« Des conditions indignes »

Et depuis une semaine, la situation ne fait que s’aggraver. (...)

A proximité de la plage, le WC automatique gratuit est le seul sanitaire à disposition. (...)

J’ai fui la Kabylie le jour où ils ont tué mon père, raconte-t-il. C’est dur et comment peut-on s’en remettre ici ? »

Comme lui, la majorité des habitants du camps dispose du statut de réfugiés. Beaucoup sont Syriens, Irakiens ou encore Kosovars. « Ils ont fui la guerre et vivent là. C’est terrible ! » conclut-il.

Au milieu de la foule, un autre jeune homme, Amin*, cherche du regard les visages connus, rencontrés lors de précédentes mobilisations. En effet, il faisait partie des migrants qui ont occupé le hall de la bourse du travail au mois d’aout. Rencontré lors de son évacuation, il venait de recevoir « une solution » d’hébergement de la préfecture. Il raconte avoir été « mis à l’abri » pendant quelques jours dans une structure d’urgence qui n’accueille que ponctuellement. Par la suite, il se serait alors retrouvé sans solution pérenne mais avec une sensation de lassitude qui ne le lâche plus depuis des jours.
« Il faut que la préfète prenne ses responsabilités »

Lors des expulsions de squats de l’été Fabienne Buccio, préfète de la Gironde, avait pourtant assuré qu’aucune fermeture de squat n’interviendrait sans que les habitants n’aient de solutions. Des propos qui avaient alors rapidement été réfutés par Aude Saldana-Cazenave, coordinatrice régionale de Médecin du Monde. Contactée par la rédaction de Rue89 Bordeaux, la préfecture ne souhaite pas commenter la situation à ce stade. (...)

« Ce n’est pas normal ! » lance Philippe, membre de l’Areve (Accueil des réfugiés en val de l’Eyre). Dans le Val de L’Eyre, environ 50 personnes sont hébergées actuellement grâce à un réseau de personnes solidaires.

« Ça ne peut pas être l’unique solution mais au moins ils ne sont pas sous la tente. Et il faut que la préfète prenne ses responsabilité ! »

Et sur place, tous sont unanimes : l’ouverture de places d’accueil stables est indispensable. (...)

Béatrice, une résidente bordelaise a ainsi tenté d’interpeller les élus présents lors du conseil de quartier du Grand Parc le 14 octobre dernier. Mais son constat est amer.

« Les élus se renvoient la responsabilité entre la Mairie, la Métropole, le Département et l’Etat. Et il n’a pas été possible de poser la question de la réquisition des bâtiments vides, alors qu’un décret de 2013 le permet. »

Déterminés à interpeller les pouvoirs publics, les militants prévoient donc de se retrouver dès vendredi afin de déterminer les actions à mener. Dans l’urgence certains bénévoles présents ont aussi fait le tour des tentes afin de faire le point sur les besoins urgents. Gage que malgré un hiver qui risque d’être rude, les cœurs restent chauds…

lire aussi : (Sud-Ouest)
Bordeaux : ils veulent un hébergement pour les "campeurs" du Lac
Des demandeurs d’asile campent sous la pluie au bord du Lac. La situation devient critique.

Farhan, 8 ans, dit  ; en baissant la tête que, maintenant, il a froid le matin en se levant. Pas étonnant. Avec sa famille, il vit sous la tente, là, sur l’herbe boueuse qui longe la plage de Bordeaux-Lac. Huit mois que ça dure. « Il n’a pas de maison », constate le père en exhibant les récépissés des demandes d’asile, protégés dans des chemises en plastique.

Au fil des démantèlements des squats de l’agglo, cet été, d’autres les ont rejoints dans ce campement de misère où le linge étendu entre les arbres ne risque pas de sécher. Des Syriens, des Macédoniens, des Mauritaniens. Des familles et des jeunes isolés. Les mieux lotis ont des bâches par-dessus leur tente, des braseros sous l’auvent, voire une voiture en panne où dormir. Pas de lumière autre que les réverbères et les phares des voitures qui passent vite. Pas de vrais sanitaires non plus.
« Inacceptable »

À la suite des orages de la semaine dernière, une douzaine d’associations (Collectif des migrants, Ovale citoyen, Cimade…), de syndicats et partis de gauche ont tiré la sonnette d’alarme. « La situation, connue des institutions, est inacceptable », disent-ils. Un rassemblement avait lieu sur place mardi soir. Les associations réclament à l’État, à la mairie de Bordeaux, à Bordeaux Métropole l’ouverture de lieux d’hébergement d’urgence et étudient les moyens d’action. Une réunion est d’ailleurs prévue vendredi à cet effet.

En attendant, les « campeurs » du Lac ne restent pas toujours seuls. Avec ou sans association, les bénévoles se relaient sur place. (...)