
Le dimanche 20 août 1899, à Paris, une manifestation libertaire en faveur de Dreyfus tourne à l’affrontement avec les antisémites et la police. Les manifestants, refoulés, pillent l’église St-Joseph. Un commissaire de police est gravement blessé après avoir voulu s’emparer d’un drapeau rouge.
(...) L’accusation de trahison portée en 1894 contre le capitaine Alfred Dreyfus, d’origine alsacienne et de confession juive, a déchiré la société française au moins jusqu’en 1906 et l’arrêt de la Cour de cassation qui l’innocente et le réhabilite.
L’affaire ne rencontrait qu’un écho limité jusqu’en 1898 où Émile Zola publie son célèbre plaidoyer dreyfusard J’accuse ! Des émeutes antisémites éclatent dans plus de vingt villes françaises. L’affaire Dreyfus atteint ainsi son paroxysme en 1899, les tensions croissent, et les deux camps semblent prêts à en découdre. (...)
"Le dimanche 20 août, cinquième jour du siège [de fort Chabrol], les libertaires convoquèrent leurs amis à manifester place de la République "en faveur de la Vérité".
Il y eut là deux troupes en face, les anarchistes et les antisémites, se menaçant, poussant des cris également ignobles : "A bas la calotte !" et "Mort aux juifs !".
La police les empêcha tout juste d’en venir aux mains, arrêta Sébastien Faure et plusieurs de ses compagnons, mais arriva trop tard à l’église Saint-Joseph, envahie par une bande de jeunes malandrins qui brisèrent les autels et les vitraux, fracturèrent les troncs, entassèrent les bancs et les chaises au milieu de la nef, et en firent un feu. [4]"
Si les anarchistes dreyfusards finissent par s’en prendre à cet édifice catholique, ce n’est certainement pas un hasard : en effet, si l’Eglise ne se positionne pas directement, ou très peu, sa presse (notamment le quotidien "La Croix" [5] et l’hebdomadaire "Le Pèlerin") prennent très nettement position de manière antisémite, contre Dreyfus. (...)
les combats font rage lors du pillage de l’église Saint-Joseph. Au cours de la journée, 137 policiers sont blessés, dont un commissaire, gravement atteint après avoir tenté de saisir un drapeau rouge. Les affrontements se poursuivent jusque dans la soirée. On déplore également de nombreuses arrestations, près de 200, dont celle de Sébastien Faure. (...)
Les conséquences de l’affaire Dreyfus
L’affaire Dreyfus divise profondément la société française.
Elle est un symbole à la fois de l’iniquité au nom de la raison d’État, et des tendances antisémites qui traversent tout le corps social. L’honneur de l’armée et de la "patrie" prime sur l’injustice commise contre un petit capitaine juif. De la raison d’Etat au racisme d’Etat, il n’y a qu’un pas. (...)