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France24
Loi sur la fin de vie : un feuilleton français qui s’éternise
#mort #findevie #euthanasie #soinspalliatifs
Article mis en ligne le 25 janvier 2025
dernière modification le 23 janvier 2025

L’entourage du Premier ministre français a fait savoir mardi que François Bayrou souhaitait scinder le projet de loi sur la fin de vie en deux textes : l’un consacré aux soins palliatifs, l’autre à l’aide à mourir. Si le gouvernement assure vouloir avancer "le plus vite possible", cette décision éloigne encore un peu plus la perspective d’un débat à l’Assemblée.

(...) Ce choix a rapidement provoqué de vives réactions, notamment de la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, pour qui "les soins palliatifs et la fin de vie doivent avancer ensemble, dans un seul texte". (...)

Pour l’Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD), cette scission revient à "céder aux représentants religieux et aux opposants à l’euthanasie [...] pour finalement ne rien faire". Même son de cloche du côté du député MoDem Olivier Falorni, inlassable défenseur du "droit à mourir dans la dignité", qui insiste sur la complémentarité des deux sujets. Soins palliatifs et aide à mourir doivent "être abordés maintenant et en même temps, pas séparément et dans longtemps", a-t-il martelé.

Malgré les critiques, le gouvernement tente de rassurer. "Il n’est pas question du tout d’abandonner [le projet]", a déclaré mercredi la porte-parole Sophie Primas à l’issue du Conseil des ministres, promettant une inscription à l’agenda parlementaire "le plus vite possible". (...)

Équation politique

François Bayrou, catholique pratiquant, s’est toujours opposé à toute légalisation de l’aide à mourir. En 2023, il confiait ainsi au Figaro : "Ne faisons pas un service public pour donner la mort." Une position qui résonne avec celle de la Conférence des évêques de France. Son président, Mgr Éric de Moulins-Beaufort, a qualifié mercredi matin la division du projet de loi de "mesure de sagesse".

Politiquement, le choix de scinder le projet ressemble à une tentative de conciliation pour le Premier ministre. Plusieurs membres du gouvernement – à l’instar du ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, issu de la droite conservatrice – ont exprimé leur réserve face à l’aide active à mourir. Diviser le texte permettrait aux parlementaires réticents, principalement à droite de l’échiquier politique, d’approuver la première partie – le renforcement des soins palliatifs – tout en rejetant la seconde – la légalisation de l’aide à mourir.

Cette stratégie répond également à une opposition persistante depuis la présentation du projet en avril dernier, notamment de religieux catholiques et musulmans, ainsi que de soignants en soins palliatifs. Ces derniers plaident pour développer d’abord ces soins, encore insuffisants en France, afin d’éviter que des patients demandent à mourir faute d’accompagnement adapté. La méthode préconisée par François Bayrou semble en partie apaiser ces inquiétudes. Deux textes, "c’est quelque chose que l’on demandait depuis le début", a souligné Claire Fourcade, présidente de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (Sfap). Dans un communiqué, le collectif Soins de vie salue également la décision du Premier ministre, affirmant qu’"en aucun cas, un ’service public de la mort’ ne doit prospérer sur les déficiences du service public de la santé". (...)

Entre décembre 2022 et avril 2023, une Convention citoyenne avait insufflé un vent d’espoir pour les défenseurs de l’aide à mourir. Près de 76 % des participants s’étaient prononcés en faveur de l’ouverture d’un accès à la fois au "suicide assisté" et à l’"euthanasie", jugeant le cadre actuel d’accompagnement de fin de vie inadapté.

Mais les obstacles politiques se sont multipliés. La dissolution de l’Assemblée nationale en juin dernier a stoppé net le projet de loi piloté par Olivier Falorni, empêchant le vote solennel du texte, initialement prévu le 18 juin. Ce texte avait pour objectif de développer les soins palliatifs tout en ouvrant la voie à la légalisation du suicide assisté et, dans certains cas, de l’euthanasie, pour les personnes atteintes d’une maladie incurable avec un pronostic vital engagé. Sans employer ces termes, il privilégiait l’expression "aide active à mourir" pour désigner ces pratiques. (...)

le temps presse pour l’adoption d’un projet de loi ambitieux avant la fin du quinquennat d’Emmanuel Macron. La scission en deux textes distincts allongerait les débats à l’Assemblée nationale, nécessitant plusieurs semaines d’examen. De plus, l’inscription de ces textes à l’ordre du jour dépendrait de l’approbation du gouvernement, rendant l’échéance incertaine. Selon des sources parlementaires citées par le quotidien Le Monde, une fenêtre de tir pourrait se présenter en mars ou en avril.