(...) Depuis six mois, nous préparions la nouvelle saison de formation. Une saison dense, de cinq mois, du 15 octobre au 15 mars, durant laquelle nous accueillons chaque année des centaines de paysannes et paysans venus se former à l’autoconstruction d’outils agricoles.
Tout était prêt
Les inventaires étaient bouclés, les machines révisées. En juin, nous avions renforcé les installations de sécurité sur notre site en Isère. Tout l’été, nos paysans-bénévoles s’étaient mobilisés pour aménager, dans les délais, notre nouvel atelier de formation en Bretagne. Les réunions de préparation s’étaient enchaînées, les camions-ateliers révisés, les plannings finalisés, les catalogues imprimés.
Les premières formations se sont tenues mi-octobre. Les groupes n’étaient pas encore complets, mais rien d’alarmant : nous connaissons le rythme du terrain. Les paysans et paysannes ne se libèrent vraiment qu’à la fin de leur saison. Début novembre, tout devait s’accélérer. Les préinscriptions confirmaient la dynamique : tout était prêt.
« Vos formations ne sont pas prioritaires. »
Mardi 21 octobre, tout bascule. Plusieurs emails venus de différentes délégations Vivéa, annoncent qu’en raison de « contraintes budgétaires ponctuelles », les formations ne seront financées que pour dix stagiaires maximum jusqu’à la fin de l’année.
Le lendemain, un nouveau message tombe. Notre conseillère Vivéa en Isère nous informe que toutes nos formations sont refusées jusqu’au 31 décembre 2025. Motif invoqué : « vos formations ne sont pas prioritaires ». Très vite, d’autres délégations relaient la même consigne.
Nous appelons, écrivons, insistons. Rien n’y fait. Les conseillers, impuissants, nous répètent qu’ils n’ont pas la main. Les retours d’autres partenaires confirment les restrictions : certains dispositifs sont partiellement épargnés. Pour nous, c’est un arrêt total :
- 76 journées de formation à déprogrammer en 2025,
- plus de 280 paysannes et paysans privés de formation cette fin d’année,
- 13 formateurs et formatrices (dont une majorité de paysans et artisans qui diversifient leurs activités en hiver) sans activité pour les deux prochains mois,
- 210 000 euros de ressources perdues et une association désormais menacée de faillite.
(...)
- Et non, nous ne pouvons pas simplement reporter ces formations à 2026, comme nous y invitent vos services : la saison de formation est courte, et nos équipes comme nos moyens matériels sont déjà engagés ailleurs.
- Et non, il ne s’agit pas d’un simple ajustement technique, ni d’une parenthèse indolore une fois l’ « émotion » retombée : c’est la moitié de notre activité annuelle qui s’effondre brutalement.
- Et non, nous n’acceptons pas d’être écartés au motif que nos formations ne seraient « pas prioritaires » alors qu’elles accompagnent les paysannes et les paysans dans leurs pratiques, leur installation, leur adaptation aux enjeux agricoles et climatiques d’aujourd’hui.
(...)
En écartant nos formations, Vivéa tourne le dos à ceux qui construisent l’agriculture paysanne au quotidien. Nous rendrons publiques les conséquences de cette décision et nous agirons partout où il le faudra pour la dénoncer.
Nous ne défendons pas une structure, mais un droit : celui des paysannes et paysans à se former, à innover, à rester maîtres de leurs outils et de leur avenir.