
(...) Les CIS mettent autour de la même table, l’État ou une collectivité territoriale, des investisseurs privés (essentiellement des banques, fonds d’investissement et assurances) et une association qui porte une initiative dite innovante.
Les investisseurs placent de l’argent dans cette initiative et selon des « indicateurs de performance », les pouvoirs publics remboursent cette somme avec des intérêts et des primes de performance établis en fonction des résultats atteints ; le retour sur investissement du contrat du Nord peut atteindre 9,50%, un très bon produit pour les marchés financiers.
Les défenseurs de ces outils arguent que les pouvoirs publics y trouvent leur intérêt puisqu’ils n’avancent pas l’argent et ne prennent pas le risque de financer une innovation sans résultat. Tout le risque, assurent-ils, est pris par les investisseurs qui ne sont remboursés que si les résultats sont attestés.
Le contrat du Nord nous montre, à l’inverse, que le mécanisme de remboursement, intérêt et prime compris, s’enclenche dès les premiers mois du programme. Quant au risque, il apparaît minime étant donné les faibles « indicateurs de performance » choisis. D’autant que le contrat prévoit des révisions possibles des objectifs à la baisse voire même un retrait anticipé des investisseurs en cas de problème. Enfin, investisseurs et département surveilleront comme du lait sur le feu, via un comité de pilotage semestriel, le déroulement de l’action et pourront à tout moment revoir ces indicateurs à la baisse, réviser le programme. Un comité de pilotage qui montre également la main mise des investisseurs, via ces outils, sur les pratiques associatives.
Des objectifs quantitatifs sont fixés pour le programme sur toute sa durée : accompagner 760 allocataires du RSA, travailleurs indépendants ou entrepreneurs pour créer son entreprise pour en faire sortir 170 du RSA pendant 12 mois consécutifs. Tous ces indicateurs doivent faire l’objet régulier de remontées de données vers l’évaluateur qui délivre des « attestations de performance » permettant le déclenchement du remboursement. (...)
La lecture de ce contrat prouve le coût extrêmement lourd de son ingénierie pour les finances publiques : La structuration du contrat portée par BNP Paribas coûte 99 200 euros ; le coût de l’évaluateur : 123 540 euros, le coût total des intérêts versés aux investisseurs : 183 946 euros. Finalement, le département paye pour cette action un montant total de 1 936 272 euros dont plus de 20% relève uniquement de l’ingénierie financière…
Reste une grande question : si on comprend l’intérêt des investisseurs, l’intérêt de l’association qui troque tout de même sa liberté d’action contre une grosse somme d’argent, quel est l’intérêt du département de choisir de dépenser autant plutôt que de passer par une subvention classique ?
Le vrai visage des contrats à impact : un piège financier pour les collectivités