Dix ans après le génocide perpétré contre les Yazidis par le groupe État islamique dans la région du Sinjar, en Irak, des dizaines de milliers de survivants déplacés rentrent chez eux. Mais leur retour est douloureux, car les exactions ont laissé des blessures indélébiles. Reportage de Marie-Charlotte Roupie.
Au matin du 3 août 2014, le groupe État islamique lance une attaque extrêmement coordonnée contre la communauté yazidie dans la région irakienne du Sinjar, au nord-ouest du pays. Face à cette offensive, la population n’a que peu de choix : se convertir, tenter de fuir ou mourir.
En quelques semaines, plus de 5 000 personnes sont tuées, tandis que les femmes et les enfants capturés sont réduits en esclavage. Parmi elles, Rayhan, aujourd’hui âgée de 24 ans, qui a enfin retrouvé son frère et s’est réinstallée avec lui au Sinjar. Mais cette jeune Yazidi, comme nombre de survivants, espère quitter au plus vite l’Irak. Car retourner vivre dans cette région meurtrie du nord-ouest irakien signifie encore, dans de nombreux villages, habiter au milieu de maisons en ruine, de paysages lunaires et du triste souvenir des absents. (...)
On estime que 350 000 personnes ont fui lors du génocide. Depuis janvier 2024, entre 130 000 et 150 000 personnes ont pris le chemin du retour vers le Sinjar, face aux pressions de Bagdad pour fermer les camps de déplacés au Kurdistan irakien.
Si la vie reprend progressivement au Sinjar, la peur d’un nouveau génocide plane toujours et les blessures de 2014 sont loin d’être refermées.